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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 42e Législature
Volume 150, Numéro 197

Le mercredi 25 avril 2018
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 25 avril 2018

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.


[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

L’antisémitisme

L’honorable Linda Frum : Honorables sénateurs, hier, B’nai Brith Canada a publié son 36e Audit annuel des incidents antisémites. Cet audit révèle que 2017 a été une année record pour les actes d’antisémitisme au Canada. Malheureusement, c’est la deuxième année consécutive au cours de laquelle on a enregistré un nombre record d’incidents de la sorte au pays.

Cette situation a de quoi nous inquiéter profondément. Les incidents de vandalisme antisémite ont plus que doublé, atteignant des niveaux jamais vus depuis 2013. En outre, de plus en plus de politiciens cherchent à obtenir l’appui de personnes connues pour entretenir des préjugés contre les juifs. La majorité des incidents antisémites se sont produits en Ontario et au Québec, mais on a aussi observé une hausse considérable du nombre d’incidents de ce genre en Alberta et en Colombie-Britannique.

Honorables sénateurs, ces tendances sont alarmantes. Nous devons agir pour contrer ces forces animées par la haine, le sectarisme et les préjugés. Nous avons la chance de vivre dans un pays pacifique et tolérant, mais nous devons éviter d’être complaisants. Comme parlementaires, nous devons dénoncer tous les cas où les forces de l’intolérance se manifestent.

Je tiens à remercier B’nai Brith Canada de son travail à l’égard de cet enjeu important.

Merci.

[Français]

Le Mois de la maladie de Parkinson

L’honorable Marie-Françoise Mégie : Honorables sénateurs, je voudrais aujourd’hui vous rappeler que le mois d’avril est le Mois de la sensibilisation à la maladie de Parkinson. Vous avez certainement entendu parler du combat que mène l’acteur Michael J. Fox contre cette maladie depuis plus de 20 ans.

Le Parkinson a été décrit pour la première fois en 1817 par le médecin anglais James Parkinson comme étant une maladie neurologique dégénérative qui touche le système nerveux central. De manière générale, cette affection se caractérise par la destruction progressive des neurones qui sécrètent la dopamine, une substance chimique impliquée dans le contrôle des mouvements du corps. Les principaux symptômes moteurs parkinsoniens sont la lenteur, la rigidité et la perte d’équilibre. Bien que les tremblements soient fréquents, ils ne sont pas systématiques. Effectivement, une personne sur trois n’en souffre pas.

En ce qui concerne les symptômes non moteurs, nous comptons, entre autres, les problèmes de sommeil, les troubles d’élocution et de déglutition ainsi que les difficultés urinaires et intestinales. D’autre part, la maladie peut également provoquer de l’anxiété, de la dépression et des changements cognitifs.

Bien que nous ne connaissions pas encore les causes précises de cette maladie, l’âge compte parmi les nombreux facteurs de risque. Au Canada, nous estimons que 100 000 personnes vivent avec le Parkinson à l’heure actuelle. Notons que 30 p. 100 d’entre elles souffriront de démence. Compte tenu du vieillissement de la population, nous devrons composer avec une hausse significative de la prévalence de cette maladie.

Parmi les autres facteurs de risque, les études évoquent une certaine susceptibilité génétique, les traumatismes crâniens, comme ceux qui caractérisent les sports de combat, ainsi que l’exposition aux pesticides.

Malheureusement, à l’heure actuelle, il n’existe aucun traitement curatif pour cette maladie évolutive. Les soins existants aident les patients à mieux gérer leurs symptômes. Au fil du temps, tous les aspects de la vie quotidienne du malade seront gravement touchés, et la maladie entraînera une perte progressive d’autonomie. Cette fâcheuse situation a des conséquences sociales et financières importantes qui se répercutent lourdement sur ceux qui prennent soin des personnes atteintes.

Justement, hier matin, lors du déjeuner parlementaire organisé par Parkinson Canada en soutien à la sensibilisation à la santé cérébrale, les proches aidants nous ont fait part de leurs préoccupations. Ils doivent demeurer constamment attentifs aux besoins du malade tout en apprenant, eux aussi, à vivre avec l’évolution de la maladie.

Face aux nombreux défis que nous devons relever collectivement, donnons espoir à notre communauté. Il convient d’unir nos forces afin d’améliorer l’offre de services des organismes qui proposent des programmes de sensibilisation et qui collaborent aux recherches liées à la maladie de Parkinson.

Honorables sénateurs, soutenons les personnes qui sont touchées par cette terrible condition.

[Traduction]

La Nova Scotia Highland Village Society

Félicitations aux lauréats des bourses d’études Treasures of Youth

L’honorable Jane Cordy : Honorables sénateurs, tout au long de l’histoire du Canada, la Nouvelle-Écosse a toujours entretenu des liens très étroits avec son patrimoine gaélique. En 1850, le gaélique écossais se situait au troisième rang des langues les plus parlées au Canada, après l’anglais et le français. Le journal entièrement rédigé en gaélique qui a connu la plus longue durée de vie a été publié à Sydney, en Nouvelle-Écosse, à la fin des années 1800. Il a été publié pendant 12 ans.

Même si le gaélique n’est plus aussi populaire qu’avant, son héritage se fait encore sentir partout en Nouvelle-Écosse. Dans cette province, le programme d’études de 11 écoles offre l’enseignement du gaélique, et de jeunes Néo-Écossais continuent d’être sensibilisés à l’importance culturelle de la langue gaélique.

Baile nan Gàidheal, le Highland Village de la Nouvelle-Écosse, situé à Iona, à l’île du Cap-Breton, joue un rôle central dans la préservation de notre patrimoine gaélique. La Nova Scotia Highland Village Society a été fondée en 1959. Elle avait pour mission de développer le village et de créer un musée d’histoire vivante pour interpréter, préserver et faire connaître la langue, la culture et le patrimoine gaéliques écossais de la Nouvelle-Écosse. En 2000, la société a établi une nouvelle relation avec le gouvernement de la province et le Highland Village est ainsi entré dans la famille du Musée de la Nouvelle-Écosse. La société continue de gérer le Highland Village pour le compte de la province.

La vision de la Nova Scotia Highland Village Society est de faire du Highland Village un centre de traditions gaéliques populaires qui entretient, communique et célèbre le patrimoine et l’identité culturelle de la communauté gaélique de la Nouvelle-Écosse.

En 2014, la Nova Scotia Highland Village Society a créé la bourse d’études Stòras na h-Òigridh — Treasures of Youth. Cette bourse est accordée à de jeunes Canadiens qui s’intéressent aux traditions gaéliques, dont la danse, le violon, le piano, la langue et les contes. Jusqu’ici, elle a été décernée à 7 jeunes âgés de 5 à 21 ans.

En 2017, Katherine MacDonald, de Little Narrows, et Abagail MacDonald, de St. Andrews, ont toutes deux reçu une bourse de 1 000 $. Les deux jeunes femmes sont des pianistes talentueuses qui sont très actives au sein de la communauté gaélique de la Nouvelle-Écosse.

Les demandes pour 2018 sont maintenant disponibles en ligne et doivent être transmises le 30 avril prochain au plus tard. Cette année, la Nova Scotia Highland Village Society remettra des bourses à trois jeunes Néo-Écossais, dont deux bourses de 1 000 $ et une de 500 $. Grâce à des bourses de ce genre, le patrimoine gaélique de la Nouvelle-Écosse restera bien vivant.

Honorables sénateurs, si vous passez à l’île du Cap-Breton cet été, je vous invite à vous arrêter dans la magnifique localité d’Iona et à faire une visite au Baile nan Gàidheal, le Highland Village de la Nouvelle-Écosse. Mòran taing. Merci.

Visiteur à la tribune

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune d’Adriana Anon. Elle est l’invitée de l’honorable sénateur Manning.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

Terre-Neuve-et-Labrador

Les gestes spontanés de gentillesse

L’honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, c’est avec plaisir que je vous présente aujourd’hui le chapitre 31 de « Notre histoire ».

Dans la vie, ce n’est pas ce que vous dites à votre sujet qui est important, mais ce que les autres disent de vous. Dans cette optique, je veux vous raconter une histoire qui a été diffusée sur le réseau CBC le 18 janvier 2018. C’est l’histoire de l’ambassadeur de l’Uruguay à Ottawa, Martin Vidal, de son épouse, Adriana Anon, et de leurs deux adolescents, qui sont allés à Terre-Neuve-et-Labrador, l’été dernier, pour de brèves vacances en vue de faire de la randonnée sur diverses parties du sentier de la côte Est.

(1410)

Ils ont tenté de louer une voiture, mais, à ce moment-là, l’agence de location ne disposait d’aucun véhicule. Ils n’ont eu d’autre choix que de se déplacer dans la région de St. John’s en taxi. Lorsqu’ils ont demandé à leur chauffeur de taxi loquace ce qui le rendait le plus fier d’être un Terre-Neuvien, il a répondu très franchement avec un fort accent de la région : « Notre générosité et notre hospitalité. Si votre voiture tombe en panne au milieu de nulle part, on ne vous laissera pas seul. Quelqu’un vous fera monter dans sa voiture, vous aidera et vous reconduira probablement à la maison si vous en avez besoin. Les gens ici sont à ce point gentils. »

Adriana connaissait la comédie musicale Come From Away présentée à Broadway, qui raconte comment 6 700 passagers aériens ont été généreusement logés dans la ville de Gander et d’autres collectivités de la région lorsque leur avion a été cloué au sol le 11 septembre 2001. Adriana se demandait s’il était possible que la gentillesse spontanée soit une qualité répandue dans une province tout entière. Sa famille et elle étaient sur le point de le découvrir!

Lorsqu’ils ont entamé leur première randonnée sur le sentier du Cap-Nord, près de Signal Hill, ils ont rencontré une Terre-Neuvienne nommée Alma Lake et son amie Renee. Les Terre-Neuviennes ont entendu Adriana et Martin discuter des différents itinéraires qu’ils souhaitaient emprunter sur le sentier lorsqu’Alma est intervenue pour offrir quelques suggestions et leur demander poliment : « Vous avez une voiture, n’est-ce pas? » Lorsqu’Adriana lui a expliqué qu’aucune agence de location de voitures n’avait de véhicule à louer et qu’ils se déplaçaient en taxi, Alma Lake a répondu rapidement : « Ah non, il vous faut une voiture. Prenez la mienne. »

Adriana et son mari n’en revenaient pas de ce qu’on venait de leur offrir. Ils ont fait remarquer à Alma qu’elle ne les connaissait même pas. Alma leur a répondu : « Ça ne fait rien. Avez-vous un permis de conduire? Prenez ma voiture. Je n’en aurai pas besoin. Vous avez besoin d’une voiture pour vous rendre à tous ces endroits. »

Après avoir pris en note les renseignements fournis par Alma et son adresse pour pouvoir lui rapporter sa voiture, la famille d’Ottawa est partie faire son voyage. À l’arrière de la voiture appartenant à cette inconnue, leur adolescente a fait la remarque suivante : « J’ai vraiment l’impression qu’il y a quelque chose qui cloche dans ce que nous faisons. »

Dans l’article, Adriana poursuit en disant ceci :

Grâce à Alma, dont le nom signifie « âme » en espagnol, nous avons passé le reste de notre séjour à St. John’s à faire le tour du majestueux sentier de la côte Est et de ses falaises, où l’air marin se mélange à l’odeur des épinettes. Nous avons vu des baleines nager tout près. Nous avons très vite su que nous avions bien fait d’aller à Terre-Neuve, un endroit isolé, mais unique et inoubliable.

Elle dit ensuite ce qui suit :

De temps à autre, pendant que nous explorions la campagne dans sa voiture, nous envoyions des textos à Alma pour lui confirmer que tout allait bien. Elle nous répondait en disant qu’elle avait expliqué à son mari, Ed, ce qu’elle avait fait et qu’il était tout à fait d’accord. Le dernier soir, Alma nous a invités à souper. Ed et elle nous ont tout de suite fait sentir comme si nous étions chez nous.

À son retour à Ottawa, Adriana a constaté que ce qu’elle avait vécu suscitait différentes réactions chez les gens. Certains disent que c’est incroyable. La plupart avouent qu’ils ne prêteraient jamais leur voiture à un étranger. Toutefois, ceux qui sont déjà allés à Terre-Neuve ne sont pas surpris.

Adriana conclut son histoire en disant : « Terre-Neuve a été un endroit exceptionnel, qui a vraiment dépassé mes attentes. » Elle ajoute: « Je ne doute plus que, à Terre-Neuve du moins, les gestes spontanés de gentillesse sont une épidémie. »

Merci, Adriana. Même si j’essayais, je ne pourrais pas mieux dire.

Les Sœurs de Sainte-Marthe

L’honorable Mary Coyle : Honorables sénateurs, « Merveilleux! Superbe! » C’est ce qu’on entendait le 3 avril lorsque les cornemuses se sont tues et que les rideaux ont été tirés afin de dévoiler un magnifique tableau en cinq toiles que la collectivité d’Antigonish a offert aux sœurs de Sainte-Marthe à l’occasion de leur déménagement dans leur nouvelle demeure.

La ville et le comté d’Antigonish avaient joint leurs efforts à ceux de l’Université St. Francis Xavier et de la Fondation de l’hôpital régional de St. Martha afin de retenir les services de l’artiste locale Anna Syperek pour qu’elle crée ce tableau intitulé Journey, un paysage allégorique, peint à l’huile, qui illustre la traversée des Sœurs de Sainte-Marthe, de leurs origines à l’Université St. Francis Xavier, à travers le Canada, aux États-Unis, et vers l’avenir.

Leur collectivité d’origine remerciait et louait les sœurs et j’ai eu l’honneur d’être la maîtresse de cérémonie pour l’activité, à laquelle des centaines de personnes ont assisté.

Pourquoi les louait-on? Je décrirais les Sœurs de Sainte-Marthe comme des directrices générales pionnières et des activistes sociales de premier plan.

En ce qui concerne leur rôle de directrices générales, au début des années 1900, ces femmes entreprenantes ont lancé une campagne de porte-à-porte qui a permis de recueillir 500 $ pour la création du premier hôpital de six places à Antigonish. Aujourd’hui, grâce à ces femmes, la ville a la chance d’avoir un hôpital régional offrant tous les services.

Pendant les années 1950, les Sœurs de Sainte-Marthe détenaient ou exploitaient 11 hôpitaux en Amérique du Nord — au Cap-Breton, à Banff, à Lethbridge et à Lowell, au Massachusetts.

Elles ont fondé l’école des sciences infirmières de St. Martha et ont participé à des programmes d’éducation et de travail social.

Sur le plan du militantisme social, vous m’avez déjà entendue parler du Mouvement d’Antigonish et de sa division féminine. Les Sœurs de Sainte-Marthe comptent parmi les principaux collaborateurs du professeur Coady, travaillant pour outiller les gens afin qu’ils puissent améliorer les conditions de vie dans leur propre collectivité. Les Sœurs de Sainte-Marthe collaborent avec le Coady International Institute et sont aujourd’hui actives à l’ONU.

Sœur Dorothy Moore, de Membertou, a défendu avec succès la langue mi’kmaq et l’inclusion de l’histoire mi’kmaq dans le programme scolaire de la Nouvelle-Écosse. Sœur Jovita MacPherson travaille auprès de personnes qui vivent dans les rues d’Halifax dans le cadre de programmes avant-gardistes qui fournissent nourriture, vêtements, coupes de cheveux, cours d’arts et services juridiques.

Lors de notre réunion du 3 avril, les champs à l’arrière de la résidence étaient labourés pour le programme d’initiation à la culture des Sœurs de Sainte-Marthe.

Le chemin qui serpente dans le tableau d’Anna Syperek illustrant le parcours des Sœurs de Sainte-Marthe bifurque vers l’inconnu. Lorsqu’on l'a interrogée sur le déclin du nombre de sœurs, Sœur Jovita a répondu d’un ton jovial — et même un peu cavalier : « Mary, nous sommes plus préoccupées par ce qu’on nous prendra à faire à notre départ! »

Moses Coady a déclaré que, s’il pouvait réunir 50 Sœurs de Sainte-Marthe, ensemble, ils pourraient changer le monde.

C’est exactement ce que ce groupe de femmes humbles, mais compétentes, fait — changer le monde en mieux — et ce, depuis 118 ans.

Honorables sénateurs, joignez-vous à moi pour applaudir ces Canadiennes exemplaires, les Sœurs de Sainte-Marthe!

L’Accord sur le commerce intérieur

L’honorable David Tkachuk : Honorables sénateurs, la décision rendue la semaine dernière par la Cour suprême dans l’affaire R c. Comeau signifie, au minimum, la fin du Canada tel que nous le connaissons.

Lorsque je présidais le Comité sénatorial des banques, il n’y a pas si longtemps, nous avons tenu des audiences sur les barrières interprovinciales au commerce. Les provinces avaient alors entamé des pourparlers avec le gouvernement fédéral dans le but d’améliorer l’Accord sur le commerce intérieur. Quand il a comparu devant nous, le ministre a affirmé être aussi déterminé que nous à éliminer les obstacles au commerce intérieur.

Alors que nos audiences tiraient à leur fin, nous avons commencé à nous inquiéter de l’absence de toute annonce concernant la conclusion des négociations concernant l’Accord sur le commerce intérieur. Nous étions à ce point préoccupés que nous avons inclus la recommandation suivante dans notre rapport :

Que, si un Accord sur le commerce intérieur renouvelé n’est pas conclu d’ici le 1er juillet 2017 ou si l’accord renouvelé est insuffisant, le gouvernement fédéral demande le renvoi, par l’intermédiaire du gouverneur en conseil, de l’article 121 de la Loi constitutionnelle de 1867 à la Cour suprême du Canada.

La Colombie-Britannique et l’Alberta ont joué un rôle de premier plan dans les négociations visant à éliminer les barrières commerciales, et la Saskatchewan et le Manitoba leur ont emboîté le pas. Les désaccords qui entourent l’expansion de l’oléoduc Trans Mountain mettent maintenant ces progrès en péril.

Le gouvernement fédéral n’a pas eu à demander le renvoi que nous avions recommandé, puisqu’un accord sur le commerce intérieur renouvelé a été annoncé peu après la publication de notre rapport. Cela dit, grâce à une décision de la Cour suprême, nous en savons maintenant beaucoup plus sur ce qu’un tel renvoi aurait signifié pour le libre-échange au Canada, et il n’y a pas de quoi se réjouir.

L’article 121 de la Loi constitutionnelle se lit comme suit :

Tous articles du crû, de la provenance ou manufacture d’aucune des provinces seront, à dater de l’union, admis en franchise dans chacune des autres provinces.

Dans la décision qu’elle a rendue contre M. Comeau, la Cour suprême a indiqué que l’expression « admis en franchise » ne fait référence qu’à des tarifs ou des charges semblables et que, cela dit, une mesure provinciale qui prévoit un tarif ou une charge semblable sera permise si elle vise à atteindre un objectif social ou à satisfaire d’autres considérations de politiques. Je ne vois vraiment pas comment la cour a pu en arriver à une telle interprétation de l’article 121.

Essentiellement, les juges ont décidé, dans leur infinie sagesse, que l’article 92, qui donne aux provinces le pouvoir de prendre règlement relativement aux matières relevant de leur compétence, a préséance sur l’article 121.

Dans une autre étude, sur l’aménagement d’un corridor national, nous avions conclu qu’un projet de l’ampleur du chemin de fer Canadien Pacifique de sir John A. serait impossible de nos jours, étant donné les objections qu’il susciterait de la part des provinces et de divers groupes d’intérêt.

L’arrêt de la Cour suprême complique encore plus les choses. Si nos marchandises ne peuvent circuler à l’intérieur du pays ni être acheminées vers les marchés étrangers et s’il devient plus facile de faire du commerce avec nos voisins du Sud qu’avec nos concitoyens, certains Canadiens se demanderont éventuellement : « À quoi cela sert-il au juste de former une Confédération? »

(1420)


[Français]

AFFAIRES COURANTES

Bibliothèque du Parlement

Présentation du premier rapport du comité mixte

L’honorable Lucie Moncion, coprésidente du Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement, présente le rapport suivant :

Le mercredi 25 avril 2018

Le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement a l’honneur de présenter son

PREMIER RAPPORT

Votre Comité recommande au Sénat qu’il soit autorisé à conseiller les présidents du Sénat et de la Chambre des communes dans l’exercice de leur autorité sur la Bibliothèque du Parlement et qu’il soit habilité à faire des recommandations aux présidents des deux Chambres concernant la régie de la bibliothèque et la bonne utilisation des crédits affectés par le Parlement à l’achat de documents ou objets destinés à y être déposés.

Votre Comité recommande :

a)que son quorum soit fixé à six membres, à condition que les deux Chambres soient représentées et qu’un membre d’un parti ou groupe parlementaire reconnu non gouvernemental et un membre du gouvernement soient présents chaque fois qu’il y a une mise aux voix ou qu’une résolution ou une autre décision est prise;

b)que les coprésidents soient autorisés à tenir des séances pour recevoir des témoignages et à les faire publier en l’absence de quorum, à condition qu’au moins trois membres soient présents, dont un membre d’un parti ou groupe parlementaire reconnu non gouvernemental et un membre du gouvernement pourvu que les deux Chambres soient représentées.

Votre comité recommande aussi au Sénat qu’il soit autorisé à siéger durant les séances et ajournements du Sénat.

Un exemplaire du Procès-verbal pertinent (réunion no 1) est déposé à la Chambre des communes.

Respectueusement soumis,

La coprésidente

LUCIE MONCION

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion de la sénatrice Moncion, l’étude du rapport est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Le Sénat

Préavis de motion concernant la période des questions de la séance du 1er mai 2018

L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, pour permettre au Sénat de recevoir un ministre de la Couronne au cours de la période des questions tel qu’autorisé par le Sénat le 10 décembre 2015, et nonobstant ce que prévoit l’article 4-7 du Règlement, lorsque le Sénat siégera le mardi 1er mai 2018, la période des questions commence à 15 h 30, toutes les délibérations alors en cours au Sénat étant interrompues jusqu’à la fin de la période des questions, qui sera d’une durée maximale de 40 minutes;

Que, si un vote par appel nominal coïncide avec la période des questions tenue à 15 h 30 ce jour-là, ce vote soit reporté et ait lieu immédiatement après la période des questions;

Que, si la sonnerie d’appel pour un vote retentit à 15 h 30 ce jour-là, elle cesse de se faire entendre pendant la période des questions et qu’elle retentisse de nouveau à la fin de la période des questions pour le temps restant;

Que, si le Sénat termine ses travaux avant 15 h 30 ce jour-là, la séance soit suspendue jusqu’à 15 h 30, heure de la période des questions.

[Français]

L’ajournement

Préavis de motion

L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 1er mai 2018, à 14 heures.

Projet de loi sur le cannabis

Préavis de motion tendant à autoriser le Comité des affaires étrangères et du commerce international à reporter la date du dépôt de son rapport sur l’étude de la teneur du projet de loi

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, nonobstant l’ordre du Sénat adopté le 15 février 2018, la date pour la soumission du rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international relativement à son étude de la teneur du projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois, dans la mesure où il concerne les obligations internationales du Canada, soit reportée du 1er mai 2018 au 9 mai 2018.

[Traduction]

Pêches et océans

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat

L’honorable Fabian Manning : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans soit autorisé à se réunir le mardi 1er mai 2018, à 17 heures, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Affaires étrangères et commerce international

Préavis de motion tendant à autoriser le comité à siéger en même temps que le Sénat

L’honorable A. Raynell Andreychuk : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international soit autorisé à se réunir le mardi 1er mai 2018, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

L’alerte Silver

Préavis d’interpellation

L’honorable Pamela Wallin : Honorables sénateurs, je donne préavis que, après-demain :

J’attirerai l’attention du Sénat sur le concept d’alerte Silver, qui reprend les éléments du système d’alerte AMBER — dont l’efficacité a déjà été démontrée — afin d’aider les 700 000 Canadiens atteints de démence, y compris de la maladie d’Alzheimer, ainsi que leurs proches et fournisseurs de soins, permettant ainsi de retrouver les adultes atteints de déficience cognitive portés disparus.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les finances

Le budget de 2018

L’honorable Larry W. Smith (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, ma question porte sur le rapport du directeur parlementaire du budget, plus précisément sur les déficits et la taxe sur le carbone. Elle s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Dans le document Perspectives économiques et financières publié lundi, le directeur parlementaire du budget signale que les déficits du gouvernement fédéral pour le présent exercice et le prochain dépasseront de près de 8 milliards de dollars les prévisions établies dans le budget de 2018. Selon lui, le déficit de cette année sera de 22 milliards de dollars, c’est-à-dire 4 milliards de dollars de plus que ce qu’avait prévu le ministre des Finances en février dernier.

De plus, le directeur parlementaire du budget a indiqué que, d’ici 2022, le coût des paiements d’intérêts de notre dette nationale augmentera à près de 40 milliards de dollars, ce qui représente, encore une fois, une hausse par rapport aux prévisions annoncées. Comme nous le savons tous, le programme électoral des libéraux promettait le retour à l’équilibre budgétaire en 2019, ce qui est impossible, selon le rapport du directeur parlementaire.

Comment le gouvernement s’attend-il à assurer une gestion saine des finances du pays, alors que ses chiffres s’avèrent erronés moins de deux mois après la présentation du budget?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Le gouvernement du Canada reste convaincu que les prévisions budgétaires, le déficit prévu ainsi que les autres données budgétaires demeurent pertinents. Je tiens à souligner que le rapport du directeur parlementaire du budget précise également que le gouvernement est en bonne voie d’atteindre son objectif quant au ratio de la dette par rapport au PIB. En fait, le directeur parlementaire du budget a confirmé que le Canada est toujours bien placé pour maintenir le ratio de la dette par rapport au PIB en deçà de 30 p. 100. J’aimerais également rappeler aux sénateurs que le Canada continue d’avoir le meilleur bilan des pays du G7, notamment grâce au fait que le plan financier du gouvernement s’appuie sur une diminution du ratio de la dette par rapport au PIB.

Je crois que tous les sénateurs savent que 67 pays, qui représentent plus de la moitié de l’économie mondiale, sont déterminés à imposer une taxe sur le carbone pour atteindre les objectifs de réduction des gaz à effet de serre et de lutte contre les changements climatiques. C’est ce qu’ont fait plusieurs provinces. En effet, la majorité des Canadiens vivent maintenant dans une province où il y a une certaine forme de tarification du carbone. C’est pourquoi le gouvernement du Canada va de l’avant avec son plan de tarification du carbone qui, et je m’en réjouis, fera l’objet d’une étude préalable au Sénat et sera exploré plus en profondeur lorsque nous serons saisis du budget.

(1430)

Le sénateur Smith : Il semble que nous avons des opinions divergentes à ce sujet. Le problème avec l’approche adoptée par le gouvernement, c’est que la dette que les jeunes accumulent au fil du temps devra être remboursée un jour. La politique du gouvernement consiste à donner d’une main et reprendre de l’autre. C’est ce qu’on appelle un financement déficitaire. Or, une telle approche ne fonctionne que si on est très chanceux et qu’on a le meilleur produit au monde.

Je dirai en passant que, si nous réalisions le projet de Trans Mountain, cela contribuerait à compenser les coûts liés au carbone, parce que cela ferait augmenter les recettes de plusieurs milliards de dollars. L’imposition d’une taxe sur le carbone est l’un des moyens par lesquels le gouvernement cherche à payer ses dépenses. Or, lundi, le directeur parlementaire du budget a indiqué que la taxe sur le carbone priverait l’économie canadienne de 10 milliards de dollars d’ici 2022. Je le répète : si le gouvernement impose cette taxe, il devra trouver un moyen de contrebalancer son coût. C’est pourquoi nous avons besoin d’activités commerciales et d’investissements.

Le leader du gouvernement pourrait-il nous dire combien la taxe sur le carbone coûtera aux familles canadiennes? Le bruit court que le gouvernement possède cette information, mais qu’il ne veut pas autoriser sa divulgation. Le leader du gouvernement pourrait-il aussi nous dire pourquoi le gouvernement cache cette information aux Canadiens, alors qu’il avait assuré aux Canadiens, durant la campagne électorale, qu’il favoriserait une plus grande transparence?

Le sénateur Harder : Permettez-moi d’abord de commenter la prémisse de la question. Le sénateur sait certainement que, avant l’arrivée au pouvoir de l’actuel gouvernement, nous avons connu des années de financement par le déficit, alors qu’on affichait moins d’enthousiasme pour les déficits dont parle le sénateur, si je puis dire. Permettez-moi simplement de répéter que le gouvernement du Canada estime que les investissements prévus dans les budgets depuis 2016 étaient indispensables pour assurer la reprise économique. En toute franchise, l’économie a réagi à ces investissements avec le degré de croissance dont j’ai fait mention, aux chapitres de la croissance brute, du taux de participation et, parallèlement, du niveau d’investissement, notamment dans les infrastructures. Ces investissements comprennent également les mesures fiscales prévues dans le projet de loi C-2, qui a stimulé la consommation chez la classe moyenne.

Voilà pour le cadre financier. Pour ce qui est de la tarification du carbone, le gouvernement a fait preuve de transparence, et le directeur parlementaire du budget a publié un rapport. Il va sans dire que le gouvernement cherche à s’attaquer aux changements climatiques en concluant avec les provinces des ententes sur la tarification du carbone. Les recettes qui en découleront resteront dans les provinces et serviront à appuyer la transition vers une économie moins axée sur le carbone.

En ce qui concerne le coût de cette mesure pour les familles, ce que le sénateur demande, le gouvernement fera les annonces pertinentes au fur et à mesure que la taxe sur le carbone sera mise en œuvre, mais il ne fait aucun doute que des coûts sont associés à la tarification du carbone. Cependant, cette mesure comporte également des avantages — substantiels, précisons-le. Voilà pourquoi le gouvernement est déterminé à s’attaquer aux changements climatiques d’une façon complète, réfléchie et financièrement responsable.

Les affaires autochtones et du Nord

La Commission de vérité et réconciliation—Le marché de services juridiques

L’honorable David Tkachuk : Sénateur Harder, il y a quelques semaines, Brian Lilley a rapporté que les responsables de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées avaient octroyé, sans appel d’offres, un contrat de plus de 5 millions de dollars au cabinet d’avocats McCarthy Tétrault, qui a pignon sur rue dans Bay Street. Ce contrat représente presque 10 p. 100 du budget total pour l’enquête. Il faut également souligner que ce contrat ne couvre qu’une période de huit mois et représente, selon M. Lilley, une dépense d’environ 21 198 $ par jour. Or, peu de détails ont été fournis quant à la nature du contrat en question.

En premier lieu, on nous a dit que c’était pour services relatifs à des travaux divers. Ensuite, on nous a dit que c’était pour des services de consultation. Enfin, on nous a dit que c’était pour le traitement électronique et l’analyse de documents.

Warren Kinsella, un libéral de longue date et un loyaliste de Chrétien, a écrit cette semaine, dans le Hill Times, que l’enquête en soi est une véritable farce. En fait, il fait écho aux commentaires du propre père de la ministre de la Justice, Jody Wilson-Raybould, qui a qualifié l’exercice de fraude, en ajoutant qu’il devrait tous nous rendre malade. Non seulement la commission perd ses membres, voilà qu’elle gaspille de l’argent.

Sénateur Harder, pouvez-vous nous dire pourquoi ce contrat a été attribué à un fournisseur exclusif, ce que fera, en détail, McCarthy Tétrault pendant huit mois pour gagner plus de 5 millions de dollars, et pourquoi le travail ne pouvait être effectué par des avocats du ministère de la Justice?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie le sénateur de sa question. Je vais me renseigner et lui reviendrai volontiers avec une réponse.

Le sénateur Tkachuk : Pouvez-vous également vérifier si l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées a attribué d’autres contrats à des fournisseurs uniques, à qui et pour quel montant?

Le sénateur Harder : J’ajouterai cela à ma demande de renseignements.

Le patrimoine canadien

Les œuvres de la collection nationale—Les permis d’exportation

L’honorable Serge Joyal : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement et porte sur la vente, par le Musée des beaux-arts du Canada, d’un tableau de Chagall, d’une valeur estimée entre 8 millions et 10 millions de dollars, chez Christie’s, à New York, le mois prochain. La ministre du Patrimoine a déclaré qu’elle n’a pas à s’ingérer dans la gestion des affaires du Musée des beaux-arts du Canada. Or, les médias ont révélé que, en fait, le permis d’exportation autorisant l’exportation du tableau à New York a été obtenu de manière irrégulière par la Commission canadienne d’examen des exportations de biens culturels.

Aux termes du paragraphe 11(2) de la loi, l’expert-vérificateur doit formuler sans délai une recommandation à la commission et au ministre. Par conséquent, lorsque le fonctionnaire a délivré la licence, il devait en informer la commission et la ministre. L’article 15 prévoit ceci : « Le ministre peut modifier, suspendre, annuler ou rétablir toute licence... » La ministre a donc le pouvoir d’empêcher la vente de cette toile à New York le mois prochain, étant donné que le gouvernement du Québec a décidé de garder l’autre toile dans sa province.

Le représentant du gouvernement va-t-il demander à la ministre d’exiger que le Musée des beaux-arts du Canada ramène la toile au pays, afin qu’elle puisse être conservée dans la collection nationale?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie encore une fois l’honorable sénateur de sa question. Il en sait beaucoup sur le sujet, compte tenu de sa défense du milieu artistique, puis à titre d’ancien ministre responsable des lois dont il est ici question. Il sait que les gouvernements ont conféré une certaine indépendance au musée, de manière à éviter toute ingérence politique dans les décisions se rapportant à l’acquisition d’œuvres d’art.

En ce qui concerne la licence d’exportation, à ma connaissance, le processus s’est fait de façon indépendante, par l’intermédiaire de la Commission canadienne d’examen des exportations de biens culturels. Je vais certainement faire valoir le point de vue du sénateur auprès de la ministre concernant sa capacité d’exercer un pouvoir discrétionnaire dans ce dossier et la volonté du sénateur que la ministre agisse dans ce sens, mais elle ne l’a pas fait jusqu’à maintenant.

Le sénateur Joyal : Une demande d’accès à l’information datant de novembre 2017 a révélé que le Musée des beaux-arts souhaite procéder à l’aliénation d’un grand nombre d’autres objets et œuvres d’art, ce qui va augmenter les ventes et les dons au musée. Je prierais le représentant du gouvernement d’attirer l’attention de la ministre sur l’article 15 de la loi. Soit dit en passant, j’étais le parrain de ce projet de loi à l’autre endroit en 1977, alors je connais très bien la teneur de cette loi.

En fait, l’article 15 a été ajouté après que j’ai suggéré que le ministre ait le dernier mot sur l’exportation de biens culturels, surtout lorsque d’importantes sommes d’argent de l’ordre de 8 à 10 millions de dollars sont en jeu. Nous ne parlons pas d’ouvrages anodins, mais bien d’œuvres d’art très importantes, comme en témoigne le prix.

Le représentant du gouvernement demandera-t-il donc à la ministre de réclamer un rapport sur la liste d’objets que le Musée des beaux-arts envisage de vendre, au Canada ou à l’étranger, afin que les Canadiens soient informés de ce qu’il advient de leur patrimoine culturel?

Le sénateur Harder : Comme je l’ai indiqué plus tôt, j’ai la ferme intention de porter la question à l’attention de la ministre. Je suis bien conscient du rôle joué par l’honorable sénateur dans la genèse de cette loi importante.

(1440)

Je veux souligner à quel point il est important, en vertu de la Loi sur les musées, que la sélection des œuvres se fasse de façon culturellement indépendante pour que le musée puisse gérer son inventaire dans l’intérêt de la conservation et de l’acquisition des œuvres d’art.

L’emploi, le développement de la main-d’œuvre et le travail

L’attestation exigée pour les emplois d’été

L’honorable Pamela Wallin : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat et concerne, encore une fois, l’attestation exigée dans le cadre du programme Emplois d’été Canada.

J’ai parlé de cette question à de nombreuses reprises, car l’attestation a fait que certains organismes de ma région et de quelque 1 500 autres endroits au pays n’ont pas pu obtenir le financement dont ils ont tellement besoin pour embaucher des étudiants pendant l’été.

Un reportage dans les médias décrivait hier de quelle façon la décision avait été prise quant au formulaire d’attestation. Sous le couvert de l’anonymat, un fonctionnaire a affirmé ce qui suit :

Les nouvelles exigences semblaient arriver de nulle part […]

Il semblerait également que les groupes religieux n’aient pas été consultés. Pour un gouvernement tellement enclin à toujours consulter, c’est étonnant.

Sénateur Harder, pendant que nous attendons la venue de la ministre, que j’ai très hâte de questionner, pourriez-vous demander de nouveau qu’on nous communique un énoncé concernant la Charte en ce qui a trait à cette mesure ou tout avis juridique qui aurait été offert, préparé ou rendu avant l’ajout de l’attestation en question?

Pouvons-nous aussi avoir l’assurance que le processus sera plus transparent et que les organismes seront consultés avant qu’une décision finale ne soit prise pour l’été prochain, de façon à garantir que les formulaires respectent la Charte?

Comme vous le savez, la liberté de religion est un droit individuel qui ne peut être étendu aux organismes ou aux projets comme un camp d’été géré par un organisme.

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénatrice d’avoir soulevé de nouveau cette question. En tant que sénateur — et je suis persuadé que d’autres sénateurs ont fait de même —, j’ai rencontré des groupes confessionnels dans ma collectivité qui m’ont fait part directement de certaines des préoccupations que l’honorable sénatrice vient de soulever.

Pour ce qui est de la venue de la ministre au Sénat, les sénateurs savent que la ministre est censée venir nous rencontrer dans deux semaines. En prévision de cette rencontre, je vais attirer l’attention de la ministre sur la demande de l’honorable sénatrice pour ce qui est des énoncés concernant la Charte et des avis juridiques, ainsi que sur cette question, encore une fois.

Pour la gouverne du Sénat, comme je l’ai signalé la dernière fois que j’ai répondu à une question de la sénatrice Wallin à ce sujet, je peux confirmer que le traitement des demandes est en cours et que le nombre de demandes reçues cette année est comparable à celui de l’an dernier.

Les affaires étrangères et le commerce international

Le rapport de l’envoyé spécial au Myanmar

L’honorable Salma Ataullahjan : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Sénateur Harder, le 3 avril, l’honorable Bob Rae, envoyé spécial du Canada au Myanmar, a publié son rapport final sur la crise à laquelle doivent faire face les Rohingyas dans ce pays. Au moment de la publication de ce rapport, le premier ministre et la ministre des Affaires étrangères ont déclaré ce qui suit :

[…] dans les semaines à venir, nous évaluerons les recommandations contenues dans ce rapport et divulguerons les mesures supplémentaires que nous avons l’intention de prendre.

En outre, dans un communiqué publié conjointement avec le ministre britannique des Affaires étrangères, Boris Johnson, la ministre Freeland a déclaré que le gouvernement prendrait un certain nombre de mesures immédiates pour donner suite au rapport de M. Rae.

Le leader du gouvernement pourrait-il s’informer, puis nous faire savoir à quel moment on peut s’attendre à ce que le gouvernement du Canada publie sa réponse à ce rapport, et pourrait-il aussi obtenir de plus amples renseignements sur les mesures que le gouvernement entend prendre?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Encore une fois, je remercie l’honorable sénatrice de sa question au sujet de ce dossier, qui préoccupe de nombreux sénateurs.

La sénatrice a déjà mentionné que le gouvernement du Canada accorde la priorité à ce dossier et qu’il l’envisage comme une initiative gouvernementale. Le premier ministre et des ministres qui partagent des vues similaires ont soulevé la question dans des forums auxquels ils ont participé récemment.

Je souligne également que la question figure non seulement au programme des ministres des Affaires étrangères du G7, mais également au programme des dirigeants du G7, et je m’attends à ce que le gouvernement fasse des annonces dans un avenir rapproché, comme ils se sont engagés à le faire. Je porterai certainement cette question à leur attention.

Les transports

Le pont Champlain

L’honorable Leo Housakos : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. La semaine dernière, j’ai posé une question au sujet du nouveau pont Champlain et des discussions entre le gouvernement et le consortium chargé de construire le pont. Voici ce que vous avez répondu :

[…] le gouvernement du Canada est d’avis que le pont sera prêt d’ici le 1er décembre.

Vous avez ensuite ajouté ce qui suit :

Selon le gouvernement du Canada, les obligations contractuelles seront respectées d’ici la date limite du 1er décembre. Si ce n’est pas le cas, le gouvernement prendra les mesures nécessaires.

Manifestement, monsieur le leader du gouvernement, vous lisiez une carte aide-mémoire dépassée, puisque vous avez omis de mentionner que le 13 avril, soit six jours avant que donniez cette réponse, le gouvernement et le consortium avaient conclu une entente reportant la date d’achèvement. Le pont doit maintenant être achevé d’ici le 21 décembre plutôt que le 1er décembre.

Vous avez affirmé dans cette enceinte la semaine dernière que le gouvernement imposerait des pénalités si le pont n’était pas terminé le 1er décembre, alors que le gouvernement savait déjà que les travaux ne seraient pas achevés dans le délai prévu et qu’il n’imposerait pas de pénalité. En fait, le gouvernement a même accepté de verser au consortium des millions de dollars de plus provenant des impôts.

Sénateur Harder, que fera le gouvernement si le nouveau pont n’est pas prêt à la date d’échéance revue, soit le 21 décembre? De toute évidence, le consortium a du mal à respecter l’échéancier et le budget. Les pénalités qui avaient été prévues dans l’entente de départ, alors que la date limite était le 1er décembre, figurent-elles dans la nouvelle entente avec le consortium, ou est-ce que le gouvernement va encore céder et laisser le consortium s’en tirer à bon compte tout en puisant dans les fonds publics pour lui donner des dizaines de millions de dollars de plus?

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Manifestement, j’ai besoin d’une nouvelle carte aide-mémoire. Je vais y voir.

Le sénateur Housakos : Honorables collègues, voilà exactement le genre de problème qui se pose avec le cirque que nous impose le gouvernement au pouvoir. Si le leader du gouvernement n’assiste pas aux discussions du Cabinet ou ne reçoit pas l’information requise pour rendre des comptes au Sénat, la situation n’est pas acceptable.

J’ai, néanmoins, une question complémentaire.

Sénateur Harder, l’abandon du péage sur le nouveau pont est le plus important changement apporté au contrat conclu avec le consortium. De quelle façon le consortium est-il indemnisé? Cela a-t-il eu des répercussions sur son échéancier, et est-ce là la raison pour laquelle il ne pourra mener le projet à bien pour le 1er décembre comme prévu?

Enfin, la nouvelle entente — l’argent en plus donné au consortium — fait-elle partie de l’indemnisation accordée pour l’annulation du péage, une décision des libéraux de M. Trudeau à caractère manifestement politique?

Le sénateur Harder : Je serai heureux d’ajouter cela à ma demande de renseignements.

[Français]

Le cabinet du premier ministre

Les excuses du gouvernement aux victimes d’expériences psychologiques

L’honorable Claude Carignan : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. En 1951, la CIA et un groupe de psychiatres ont mis sur pied le projet Bluebird, au Centre hospitalier de l’Université McGill, qui devait servir à l’élaboration de techniques de lavage de cerveau, de conditionnement, de persuasion, de propagande et de contrôle psychologique des masses et des membres d’organisations. Le Dr Cameron, ancien colonel de l’armée américaine, dirigeait ce programme et son objectif était de déprogrammer le cerveau du patient pour le reconstruire ensuite.

Cependant, avant de reconstruire une personnalité, il faut la détruire. Pour ce faire, le psychiatre injectait à ses patients du LSD et des barbituriques afin de les déstabiliser, puis il les soumettait à des traitements d’électrochocs à raison de trois séances par jour, et ce, pendant plusieurs mois. Le patient subissait ensuite de longs mois de privation sensorielle en caisson d’isolement, une succession de douches chaudes et glacées, et une cure de sommeil qui pouvait durer plusieurs jours.

À ce stade du traitement, le patient devait avoir atteint un état de confusion aiguë et de désorientation complète, et avoir perdu ses habitudes alimentaires ainsi que le contrôle de sa vessie et de ses intestins, comme le décrivait le Dr Cameron dans un article publié par l’American Psychopathological Association. Le reconditionnement pouvait donc commencer. On utilisait alors un magnétophone qui diffusait en boucle, parfois jusqu’à plus de 500 000 fois, des messages permettant de reconstruire l’identité du patient.

En 1960, la CIA a mis fin au programme de recherche du Dr Cameron. Celui-ci s’est tourné vers le gouvernement du Canada, qui a subventionné ses travaux jusqu’en 1963...

Son Honneur le Président : Sénateur Carignan, veuillez poser votre question.

Le sénateur Carignan : Oui. Vous comprendrez que ce sont des événements qui se sont passés à compter de 1950. Il m’était donc nécessaire de présenter une introduction un peu plus longue.

Sénateur Harder, est-ce que le gouvernement Trudeau présentera aux victimes du Dr Cameron les excuses qu’ils n’ont pas encore reçues?

[Traduction]

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Je le remercie également d’avoir replacé les choses dans leur contexte, parce que le Sénat et la Chambre des communes sont saisis sporadiquement de cette question depuis de nombreuses années déjà. Je me rappelle que l'épouse d’un ex-député, un dénommé Orlikow, a fait partie de cette expérience, si on peut dire les choses ainsi.

(1450)

Je ne manquerai pas d’attirer l’attention du gouvernement sur la suggestion de l’honorable sénateur quant aux mesures que l’État pourrait prendre dans ce dossier. Il s’agit effectivement d’une page de l’histoire canadienne qui mérite d’être exposée au grand jour et condamnée.

[Français]

Le sénateur Carignan : Les journalistes de la CBC ont découvert, enfouis dans les comptes publics de 2017, des débours liés à un règlement accordé à la famille Steel à la suite des traitements infligés par le Dr Cameron. Secrètement, le gouvernement a conclu une entente de règlement avec cette famille, alors que toutes les autres familles touchées semblent devoir surmonter des obstacles importants.

Le gouvernement prendra-t-il l’engagement d’indemniser toutes les autres victimes du Dr Cameron?

[Traduction]

Le sénateur Harder : Je me renseignerai là-dessus aussi, sénateur, et je vous reviendrai avec une réponse.

[Français]

Les finances

Le budget de 2018

L’honorable Ghislain Maltais : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat et fait suite à la question du sénateur Smith. En 2018 — et cela vous facilitera les choses, sénateur Harder —, le Sénat a confié sans équivoque au Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts le mandat d’étudier les conséquences de la tarification du carbone sur l’agriculture canadienne. On sait que l’agriculture représente une très grande partie de l’économie canadienne, a mari usque ad mare.

Je ne crois pas que cette étude puisse se terminer avant la fin mai ou juin, parce que nous devons, bien entendu, étudier d’autres projets de loi. Serait-il possible, sénateur Harder, que le gouvernement attende que le comité dépose son rapport au Sénat avant de procéder à la mise en œuvre de la tarification du carbone?

Nous pouvons déjà constater qu’une taxe uniforme sera très mal reçue, et nous croyons que le gouvernement devrait envisager plutôt une taxe modulée.

[Traduction]

L’honorable Peter Harder (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénateur de sa question. Le gouvernement croit fermement aux vertus des mesures contenues dans le budget qu’il a présenté à l’autre endroit et dans le projet de loi qui le met en œuvre et dont le Sénat a fait l’étude préalable, y compris en ce qui concerne la taxe sur le carbone.

C’est au gouvernement de décider de la trajectoire économique que prend le pays et de présenter des projets de loi au Parlement du Canada. Or, le gouvernement est d’avis que, en procédant comme il le fait et en agissant dès maintenant, il fait montre de prudence et fait prendre la bonne direction au Canada, car les stratégies proposées lui permettent de remplir ses obligations et ses engagements relativement aux changements climatiques.

Je peux assurer à l’honorable sénateur que ce n’est pas la dernière fois dans le budget qu’il entend parler de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone et de la lutte contre les changements climatiques. Cette bataille est celle d’une génération. Nous ne manquerons pas d’occasions de débattre des différents aspects des changements à venir, mais une chose est sûre : le gouvernement est déterminé et il ne restera pas sur la touche.

[Français]

Le sénateur Maltais : Merci, monsieur le représentant, de votre réponse. J’ai toutefois encore une question. Certaines provinces ont déjà mis en œuvre des systèmes de tarification du carbone et d’autres procèdent à une réflexion approfondie; un taux uniformisé comme celui qu’envisage le gouvernement ne risque-t-il pas de heurter certaines provinces? Si c’est le cas, quelles mesures le gouvernement entend-il prendre pour acheter la paix avec les provinces, tout en conservant une certaine uniformité?

[Traduction]

Le sénateur Harder : Comme l’honorable sénateur le sait, depuis plus de deux ans, le gouvernement du Canada tient d’intenses discussions avec les provinces sur une approche pancanadienne en matière de tarification du carbone et d’autres mesures pour lutter contre les changements climatiques. L’approche adoptée par le gouvernement fait fond sur les mesures provinciales en place. Elle fait en sorte que les provinces conservent les recettes recueillies et puissent les utiliser à bon escient sur leur territoire.

C’est un élément non seulement d’un effort canadien, mais aussi d’un effort mondial, dont le Canada est fier d’être un chef de file.

Agriculture et forêts

Les travaux du comité

L’honorable Yuen Pau Woo : Honorables sénateurs, ma question s’adresse à la présidente du Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts.

Sénatrice Griffin, je me demande si vous pouvez confirmer que le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts a discuté du risque que l’étude sur l’impact des changements climatiques sur l’agriculture ne soit pas terminée à temps ou de la possibilité de reporter la date de dépôt du rapport et de retarder également la mise en œuvre de la taxe sur le carbone en raison de tout retard dans la réalisation de l’étude?

L’honorable Diane F. Griffin : Le rapport n’est pas encore terminé, mais nous avons entendu tous les témoignages. Le rapport sera rédigé au cours de l’été et ensuite déposé au Sénat à l’automne quand il aura été approuvé par le comité.

Nous n’avons toutefois pas discuté de la possibilité que l’instauration de la taxe soit retardée ou demandé à ce qu’elle soit retardée en raison de notre étude. De plus, le comité de la sénatrice Galvez mène une étude sur l’économie à faibles émissions de carbone. Je soupçonne qu’il se trouve dans la même situation, puisqu'il a produit des rapports intérimaires, mais aucun rapport final.

Beaucoup d’information à ce sujet sera fournie au Sénat, mais, entre-temps, le gouvernement avance en prenant les mesures qu’il juge nécessaires, comme nous le montrent le budget et d’autres sources. Évidemment, lorsque notre rapport sera prêt, il éclairera encore davantage le gouvernement dans sa démarche.


ORDRE DU JOUR

Les travaux du Sénat

L’honorable Donald Neil Plett : Chers collègues, je me suis exprimé hier au sujet de la motion de la sénatrice Pate visant à retirer le site web de la sénatrice Beyak. Le sénateur Sinclair a alors dit ceci :

Le sénateur Plett m’accuse d’appuyer la motion et d’avoir pris la parole pour l’appuyer, alors qu’il n’en est rien.

Contrairement à ce que dit le sénateur Sinclair, je n’ai pas déclaré qu’il avait pris la parole pour appuyer cette motion. Cependant, j’ai indiqué qu’il appuyait la motion. Voici ce que j’ai dit :

Je suis étonné et même troublé de voir que le sénateur Sinclair, un éminent juge, appuie cette motion, une motion qui propose une sanction avant même qu’une décision ait été rendue. Je ne crois pas que le sénateur Sinclair accepterait une telle chose dans son tribunal, et il devrait en aller de même ici.

Bien que le sénateur Sinclair ait raison de préciser qu’il n’a pas pris la parole au sujet de la motion dont le Sénat a débattu hier, il a bel et bien fait des observations dans cette enceinte qui, selon moi, portent logiquement à croire qu’il appuie cette motion.

Je vous cite notamment un extrait de ce que le sénateur Sinclair a dit lorsque le Sénat débattait de la question de privilège soulevée par la sénatrice Beyak :

Le site web du Sénat est administré par le Sénat, mais le contenu du site web qui a été fourni à la sénatrice Beyak par le Sénat a été approuvé par elle et placé là par elle, mais pas parce qu’il est passé par ici ni même parce qu’elle souscrit à ce qui y est dit. Ces commentaires sont ceux de membres du public et, quoi qu’on en dise et quoi qu’on en fasse, la plupart de ces commentaires sont racistes. Certains frôlent même les discours haineux. Il y en a qui sont tellement scandaleux qu’ils peuvent inciter les gens à croire des faussetés au sujet des peuples autochtones ou à poser des gestes contre eux, et je crois que les messages de cet acabit devraient tous nous inquiéter. Or, ce sont les ressources du Sénat qui servent à tout cela.

Selon moi, la motion de la sénatrice Pate est tout à fait appropriée, parce que sa portée se limite à savoir si le Sénat devrait permettre que ses ressources servent à offrir une tribune comme celle-là au public.

(1500)

Donc, si j’ai tort de croire que ces observations laissent entendre que le sénateur Sinclair appuie la motion, je lui présente mes excuses, et, du coup, s’il souhaite que je retire mes paroles, je serai ravi de le faire.

La Loi électorale du Canada

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Mercer, appuyée par l’honorable sénateur Day, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-50, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (financement politique).

L’honorable Linda Frum : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à titre de porte-parole pour le projet de loi C-50, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (financement politique).

Après deux ans et demi au pouvoir, le projet de loi C-50 est la seule et unique mesure législative du gouvernement libérale adoptée par l’autre endroit et renvoyée au Sénat visant la question de la réforme électorale, qui est d’une importance capitale à l’ère numérique. Qu’il s’agisse des campagnes de désinformation délibérée commanditées par des gouvernements étrangers hostiles, des inégalités entre les partis politiques enregistrés et les tiers enregistrés, des infractions aux lois en matière de publicité électorale ou de l’effet de distorsion causé par les puissants conglomérats des médias sociaux dans le monde de la politique, il est urgent d’adopter des mesures législatives visant à protéger les élections du Canada contre la fraude, l’ingérence, le piratage, l’exploration de données et l’influence étrangère.

Le projet de loi C-50 répond-il ou tente-t-il même de répondre à ces enjeux véritablement cruciaux pour la souveraineté politique et électorale du Canada? La réponse est non. Au contraire, tout ce que le gouvernement a réussi à proposer, c’est une pâle copie d’une loi existante concernant la transparence des activités de financement politique. Le projet de loi C-50 ne prévoit presque rien qui n’est pas déjà inscrit dans la loi. Le seul changement qu’il apporte, c’est que le nom des personnes qui participent à une activité de financement politique où le premier ministre, des ministres du Cabinet ou un chef de parti sont présents et qui font un don de plus de 200 $ doit être publié dans les 30 jours suivant l’activité.

Le projet de loi C-50 est la solution trouvée par le service ministériel des communications pour faire oublier le scandale des accès préférentiels impliquant le premier ministre et la ministre de la Justice. À mon avis, la solution la plus simple aurait été que le premier ministre et les membres du Cabinet respectent les règles telles qu’elles sont écrites. Ces règles se trouvent sur le site web du premier ministre :

Les ministres et les secrétaires parlementaires doivent éviter tout conflit d’intérêt, toute apparence de conflit d’intérêt et toute situation pouvant donner lieu à un conflit d’intérêt […]

Les ministres et les secrétaires parlementaires doivent s’assurer que les activités de financement politique ou autres éléments liés au financement politique n’ont pas, ou ne semblent pas avoir, d’incidence sur l’exercice de leurs fonctions officielles ou sur l’accès de particuliers ou d’organismes au gouvernement.

Il ne doit y avoir aucun accès préférentiel au gouvernement, ou apparence d’accès préférentiel, accordé à des particuliers ou à des organismes en raison des contributions financières qu’ils auraient versées aux politiciens ou aux partis politiques.

Aucun particulier ou organisme ne doit être visé, ou sembler être visé, par une collecte partisane parce qu’ils traitent officiellement avec des ministres et des secrétaires parlementaires, ou avec leur personnel ou leur ministère.

Peu importe que ces règles existent déjà, on nous demande d’étudier le projet de loi C-50.

Honorables collègues, je propose donc d’en finir au plus vite. Adoptons cet exercice inutile de relations publiques pour que nous puissions passer aux vraies questions urgentes en matière de réforme du système électoral, qui mettent en péril notre démocratie, comme ce dont il est question dans le projet de loi S-239.

Ce projet de loi, je l’ai présenté le 2 juin 2017, c’est-à-dire il y a près d’un an, et il stagne depuis à cause du Groupe des sénateurs indépendants. Il ferait disparaître une échappatoire que le directeur général des élections et le commissaire aux élections fédérales ont déjà relevée, à savoir que des intérêts étrangers peuvent contribuer aux activités électorales de tiers canadiens.

Il convient de noter que, lorsque le très respecté et non partisan Forum des politiques publiques a mené son étude sur le besoin pressant d’une réforme électorale efficace, le projet de loi C-50 n’a pas été mentionné. Cependant, il a souligné beaucoup, voire la totalité, des points que j’essaie de faire valoir à mes collègues depuis les 11 derniers mois. D’ailleurs, il est question de certains de ces points dans le projet de loi S-239. Pour votre gouverne, voici un résumé des huit recommandations formulées dans le rapport du Forum des politiques publiques :

1. Permettre seulement aux électeurs admissibles (c.-à-d. les Canadiens) de faire des contributions politiques.

2. Créer des règles du jeu équitables afin que les dons faits aux tiers enregistrés correspondent à ceux des partis politiques.

3. Prolonger les délais pour que les dépenses électorales s’appliquent six mois avant la date fixée pour l’élection.

4. Augmenter la transparence concernant les tiers.

5. Maintenir l’équilibre existant entre les contributions publiques et privées.

6. Réduire le seuil du remboursement par l’État.

7. Réglementer les contributions en nature en imposant des sanctions administratives.

8. Augmenter la transparence des médias sociaux et du micro-ciblage.

Honorables sénateurs, voilà les sujets dont les responsables des politiques publiques qui souhaitent une véritable réforme aimeraient traiter. En ce qui a trait au projet de loi C-50, adoptons-le ou ignorons-le, mais soyons clairs : il n’accomplit absolument rien d’utile en matière de réforme démocratique.

(Sur la motion du sénateur Gold, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur la Semaine de la gentillesse

Deuxième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Jim Munson propose que le projet de loi S-244, Loi instituant la Semaine de la gentillesse, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, au Sénat, nous abordons beaucoup d’enjeux importants et de questions graves, mais je pense qu’il est temps d’être gentils. Aujourd’hui, nous avons entendu parler de nombreux gestes de gentillesse : le sénateur Manning a parlé de la voiture qui a été prêtée à des étrangers, et la sénatrice Coyle des Sœurs de Sainte-Marthe, à l’Université St. Francis Xavier, et des gestes de gentillesse qu’elles ont posés. Ainsi, je pense qu’ils ont donné le ton à ce dont je m’apprête à parler.

Auparavant, je signale qu’il semble que c’est aujourd’hui la Journée « Remerciez un plombier ».

Le sénateur Plett : Bravo!

Le sénateur Munson : Le voilà, l’estimé Don Plett, le 25 avril, et j’en aurai peut-être plus à dire à ce sujet dans un instant.

C’est pour moi un honneur de parler, à l’étape de la deuxième lecture, du projet de loi S-244, Loi instituant la Semaine de la gentillesse. Le but de ce projet de loi est simple : que le Canada désigne la troisième semaine de février comme Semaine de la gentillesse tous les ans. La gentillesse est décrite comme une qualité consistant à être amical, généreux et attentionné. Cela semble tellement simple, mais, comme je l’ai récemment appris, il existe des études sur les effets de la gentillesse sur nous et sur les motivations qui la sous-tendent. Nous savons que la gentillesse est bonne pour la santé — la santé physique et le bien-être mental — et qu’elle a aussi des répercussions sociales positives. Je crois que le fait de désigner une semaine de la gentillesse tous les ans contribuera à créer une culture de gentillesse qui sera à l’avantage des Canadiens de tout le pays.

L’idée de souligner la gentillesse n’est pas nouvelle. La Semaine de la gentillesse est une tradition à Ottawa depuis 11 ans grâce aux encouragements du rabbin Bulka et de Centraide, et elle est aussi reconnue à l’Assemblée législative de l’Ontario depuis neuf ans grâce en partie au travail et au soutien de mon ami, le député d’Ottawa-Centre, Yasir Naqvi.

(1510)

Beaucoup d’écoles et de collectivités au pays célèbrent déjà une semaine ou une journée de la gentillesse. La Colombie-Britannique met l’accent sur les actes de bonté spontanés chaque année en février, et ce, depuis plusieurs années, comme le sénateur Manning l’a souligné aujourd’hui. De plus, de nombreux pays célèbrent la Journée mondiale de la gentillesse, qui a lieu en novembre.

Je suis certain que plusieurs sénateurs ont entendu parler de campagnes de gentillesse qui se déroulent dans leurs collectivités, que ce soit grâce aux nouvelles locales ou par l’entremise de personnes qui ont à cœur de changer les choses. Il y a chaque jour, partout au pays, des gestes guidés par la bonté et le sens moral. Pensons, par exemple, à l’incident tragique qui s’est produit à Toronto; depuis deux jours, nous pouvons lire le récit des gestes de gentillesse qui se produisent à Toronto, où les gens s’entraident et se soutiennent en ce moment difficile.

Je songe aujourd’hui à des gens comme Brent Kerr, Luke Elwood et Mark Decker, de Dartmouth, en Nouvelle-Écosse, qui ont fait 150 bonnes actions en l’honneur du 150e anniversaire du Canada. Je pense aussi à une collectivité de Terre-Neuve, Springdale, qui a célébré en février, pour la deuxième année, une semaine de la gentillesse.

Quelle est la source de ma motivation? Je suis né au Nouveau-Brunswick et j’y ai grandi. Vous vous souvenez peut-être de l’histoire d’une jeune Néo- Brunswickoise, Rebecca Schofield. Rebecca a créé une tradition de gentillesse grâce à sa campagne #Beccamaditde. Elle a lancé cette campagne, qui allait devenir son héritage, en décembre 2016, il y a seulement deux ans, après avoir appris qu’il ne lui restait que quelques mois à vivre en raison d’un cancer du cerveau. Becca est malheureusement décédée en février de cette année, mais son influence se fera sentir encore très longtemps.

En effet, la jeune Becca a provoqué une énorme vague de bienveillance, qui s’est répandue depuis le Nouveau-Brunswick au reste du Canada et aussi loin qu’en Australie, en demandant aux gens de poser de simples gestes de gentillesse. Cela faisait partie de sa liste de choses à faire avant de mourir. Son message m’a profondément touché. Le voici :

J’ai toujours su que les gens sont capables de gentillesse. La gentillesse et l’optimisme sont des choix qu’on décide de faire à chaque fois.

C’est formidable de penser que j’ai inspiré des gens à prendre cette décision tous les jours, encore et encore.

Eh bien, Becca et son mouvement pour la gentillesse m’ont certainement inspiré et j’espère qu’il en est de même pour d’autres sénateurs. Je propose d’instituer la Semaine de la gentillesse pour nous rappeler de faire preuve de bienveillance, de compassion et de générosité les uns envers les autres, comme Becca le souhaitait.

J’aimerais que les initiatives comme celle de Rebecca soient soulignées et célébrées ensemble au même moment chaque année et que ces entreprises de gentillesse reçoivent l’attention qu’elles méritent partout au pays. Je souhaite voir une semaine de la gentillesse au Canada inciter plus de gens à donner de leur temps à leur collectivité ou même simplement à sourire aux autres. Une semaine de la gentillesse pourrait faire boule de neige d’un bout à l’autre du pays, grâce à des campagnes de sensibilisation, à la participation des écoles, au bénévolat, à des collectes de fonds, à l’entraide et j’en passe. Une semaine de la gentillesse donnerait aux collectivités, aux organismes et aux écoles une occasion de diffuser un message d’optimisme, d’offrir des programmes et de mener des activités de rayonnement. J’ose espérer que cela fera du Canada un pays plus bienveillant, plus agréable et plus sain pour tout le monde.

Je rappelle aux honorables sénateurs que j’ai présenté, il y a quelques années, un projet de loi d’initiative parlementaire afin de désigner le 2 avril Journée mondiale de sensibilisation à l’autisme. Cette journée va maintenant au-delà des gestes de gentillesse. Elle incite à l’action et elle encourage le milieu de l’autisme à parler d’une seule voix et à se mobiliser pour se faire entendre par le gouvernement.

Ma mère disait toujours : « Où s’en va le monde? » Je ne sais pas si votre mère se posait également la question pendant les années 1950, 1960, 1970 ou 1980.

Avec tout ce qui se passe et ce que les médias rapportent dans le monde de nos jours — qu’il soit question d’intimidation, de harcèlement, d’isolement ou d’exclusion —, il est plus important que jamais de rappeler aux gens de traiter leur prochain avec amour et gentillesse. Nous passons tellement de temps à dire comment ne pas traiter les autres, ne pas leur faire de mal ou ne pas leur manquer de respect — et il est essentiel d’en discuter —, mais n’est-il pas temps de commencer à rappeler l’importance d’être gentil, bienveillant ou tout simplement agréable les uns envers les autres? Nous devons profiter de l’occasion de montrer comment des gestes de gentillesse volontaires peuvent avoir des effets positifs dans le monde qui nous entoure. Il y a tout simplement trop de haine dans le monde.

Cela me rappelle une citation de Martin Luther King sur la compassion :

L’obscurité ne peut pas chasser l’obscurité; seule la lumière le peut. La haine ne peut pas chasser la haine; seul l’amour le peut.

En cette époque où une foule de problèmes nous affligent tous les jours, je crois qu’il est temps de commencer à raconter des histoires de gentillesse, de respect et de bonté. La désignation d'une semaine de la gentillesse nous en donnera justement l’occasion. Voilà à quoi la Semaine de la gentillesse peut servir.

Nous savons tous à quel point il est agréable d’être traité avec gentillesse par quelqu’un d’autre. C’est ce que nous ressentons tous les jours lorsqu’une personne nous ouvre la porte à l’occasion. Lorsque des gens font quelque chose de gentil pour nous, nous ressentons à la fois de la joie, de la reconnaissance et de la gratitude. Les bienfaits de la gentillesse vont essentiellement de soi; je n’ai pas à m’étendre longuement sur le sujet. Lorsque nous sommes gentils et agréables, nous contribuons au bonheur et au bien-être de ceux que nous aidons.

En nous appuyant sur nos expériences personnelles, nous savons que nous devrions faire preuve de gentillesse pour rendre heureux les gens qui nous entourent. Toutefois, avez-vous déjà remarqué à quel point il est agréable de faire quelque chose de gentil pour quelqu’un d’autre? De petits gestes, comme tenir la porte, laisser passer quelqu’un devant soi dans une file d’attente, faire un compliment ou offrir un café, sont simples, mais gratifiants. Nous nous sentons bien d’avoir donné un coup de main à quelqu’un : les actes de gentillesse ont des effets positifs pour les deux parties concernées.

Plusieurs études ont conclu que les avantages d’être gentil, de donner de son temps ou de son argent à une personne ou à une cause peuvent accroître le bonheur de la personne qui donne, et pas seulement de la personne qui reçoit. En effet, les actes d’altruisme augmentent la production de sérotonine, « l’hormone du bonheur » qui contribue à nous rendre plus heureux. Ils peuvent également augmenter les niveaux d’ocytocine et d’endorphine.

De plus, il est prouvé que les activités philanthropiques stimulent le centre du plaisir du cerveau, ce qui accroît l’optimisme et l’estime de soi. On qualifie ce sous-produit de la gentillesse d’euphorie altruiste. Ainsi, favoriser la gentillesse ne ferait pas qu’augmenter le bonheur des bénéficiaires d’une telle délicatesse, mais améliorerait également la santé mentale et le sentiment de bonheur des personnes gentilles.

Il existe d’autres avantages à aider son prochain. Si l’amélioration de la santé mentale est un argument de taille en faveur de la gentillesse, il y a aussi des avantages sur le plan de la santé physique. Plusieurs études montrent que le bénévolat et les actes de gentillesse peuvent améliorer la santé cardiaque, réduire le niveau de stress et la pression artérielle en plus d’augmenter le niveau d’énergie et l’espérance de vie. En choisissant d’être gentil, on ne fait pas que contribuer au bien-être des autres : on améliore aussi son propre bien-être. Tout le monde en sort gagnant.

Chers collègues, en fait, la gentillesse n’est pas seulement avantageuse pour les parties concernées. La science nous indique que les effets positifs de la gentillesse sont également ressentis par toutes les personnes qui en sont témoins, ce que l’on appelle l’élévation morale.

En plus d’avoir aussi des effets positifs sur le cerveau et le système nerveux des gens qui les observent, les actes de gentillesse incitent ces personnes à vouloir, elles aussi, faire preuve d’altruisme. La gentillesse est donc littéralement contagieuse. Quand on voit quelqu’un agir avec gentillesse, on veut l’imiter. Un geste peut créer un effet d’entraînement. C’est pourquoi je propose la désignation d’une semaine de la gentillesse. Un seul acte de gentillesse pourrait en engendrer des milliers d’autres au Canada durant cette semaine.

Honorables sénateurs, je sais qu’il faudra un certain temps pour que la Semaine de la gentillesse soit instituée officiellement. Je le sais d’expérience. Il a fallu trois ans pour que mon projet de loi sur l’autisme soit adopté, mais le jeu en valait la chandelle. Je demande à chacun d’entre vous de poser des actes de gentillesse et de dire des mots gentils à autrui au cours des prochains jours afin de voir ce que cela vous fait ressentir. N’oubliez pas que, en posant un seul acte de gentillesse, vous aidez quelqu’un d’autre, vous améliorez votre état de santé et vous inciterez probablement une autre personne à faire preuve de générosité, ce qui pourrait entraîner une série d’actes de gentillesse. Je vous invite à m’informer de vos actes de gentillesse en utilisant le mot-clic #Soyezgentils sur Twitter.

Honorables sénateurs, en terminant, je tiens à vous rappeler que les Canadiens ont la réputation d’être polis et aimables. Il me semble donc indiqué de désigner une semaine en février, en plein milieu de l’hiver et aux environs de la Saint-Valentin, où ils seront appelés à être gentils avec les autres et à répandre la gentillesse et la compassion dans tous les coins du pays, et peut-être même ailleurs.

Mesdames et messieurs les sénateurs, ne serait-il pas tout à fait indiqué pour le Canada, qui est déjà connu pour la politesse de ses habitants, de devenir le premier pays au monde à instituer une semaine nationale de la gentillesse?

Je vais maintenant citer quatre personnes qui ont décrit, chacune à sa façon, la gentillesse.

(1520)

Mark Twain : « La gentillesse est le langage que les sourds peuvent entendre et que les aveugles peuvent voir. »

Mère Teresa : « Un mot aimable peut être bref, mais résonner indéfiniment. »

Le bouddha : « Lorsque les mots sont justes et généreux, ils peuvent changer le monde. »

Le sénateur Don Plett : « Remerciez un plombier. »

C’est important, car cela montre qu’il y a en chacun de nous la possibilité — et mon regard se tourne maintenant vers le sénateur Plett…

Le sénateur Dawson : Il ressemble au bouddha.

Le sénateur Munson : C’est le moment où jamais. Lorsqu’on est en état de pleine conscience et que l’on fait abstraction de tout ce qui nous entoure, on doit, de temps en temps, prendre une grande respiration et penser les uns aux autres. Merci, honorables sénateurs.

L’honorable Nicole Eaton : Vous ai-je bien compris, sénateur Munson, lorsque vous nous demandez de partager sur Twitter des gestes d’amabilité?

Le sénateur Munson : Oui, au mot-clic #Soyezgentils.

La sénatrice Eaton : Je ne sais pas pour vous, sénateur, mais j’ai été élevée dans le catholicisme, et on nous disait que la dernière chose à faire lorsque l’on fait un geste d’amabilité, c’est de s’en vanter.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : J’ai également quelques questions à poser au sénateur Munson.

Merci beaucoup, sénateur, d’avoir attiré notre attention sur ce sujet. J’avais deux questions à vous poser. J’ai rencontré une Albertaine — qui venait, je crois, de la région d’Edmonton — dont la ville avait été témoin d’un acte de très grande violence. Elle et ses concitoyens cherchaient à surmonter cette tragédie. Le contraire d’un acte de violence aveugle est un acte d’amabilité aveugle. Il y a eu un vaste mouvement mondial en ce sens. Je sais qu’il y a en novembre une Journée de la gentillesse — Actes de bonté au hasard, mais, dans la semaine de février dont nous parlons, il y a, en Colombie-Britannique, une enseignante de l’école où j’ai moi-même enseigné — à une autre époque — qui a lancé, dans le cadre de cette même semaine, un mouvement appelé Real Acts of Kindness, ou RAK. Ce mouvement dirigé par des étudiants a fait de grandes choses. Avez-vous entendu parler de ce second groupe, Real Acts of Kindness, qui œuvre au cours de cette même semaine? Pourrait-on l’intégrer dans le projet de loi? Les gens qui en font partie seraient ravis d’apprendre l’existence de cette initiative nationale.

Le sénateur Munson : Eh bien, dans cet esprit de gentillesse, j’aimerais absolument en entendre davantage à ce sujet. Je sais que des efforts en ce sens sont en cours en Colombie-Britannique, comme je l’ai mentionné. Si nous voulions changer le nom du projet de loi pour « De vrais actes de gentillesse », cela ne me dérangerait point.

Comme il est question de compassion et de gentillesse, avez-vous vu le dessin de Michael de Adder hier montrant, bras dessus, bras dessous, un joueur de hockey de Toronto et un autre de Humboldt, en Saskatchewan?

Cela me fait penser aux événements de la vie, à la façon dont ils peuvent nous frapper et à ce que nous sommes parfois obligés de vivre. J’ai récemment été touché par un moment de gentillesse. En effet, ce matin, j’ai presque dû m’arrêter en conduisant pendant que j’écoutais l’entrevue du jeune joueur de hockey de Humboldt qui est paralysé. Il n’est pas au bout de ses peines. Selon vous, qui ont été les premières personnes à aller le voir dans sa chambre? Ce furent des membres de l’équipe de hockey sur luge du Canada, qui ont tous eu à surmonter des défis inimaginables dans leur vie et qui font maintenant partie de l’équipe nationale de hockey sur luge. Pour lui, cette attention de leur part fut un geste rempli de bonté.

Nous sommes témoins de gestes de gentillesse à longueur de journée. Pourtant je pense qu’on les laisse filer, qu’on ne les intègre pas et qu’on ne fait pas l’effort de les mettre en pratique. Si on peut se tenir la main d’un bout à l’autre du pays, pourquoi ne le ferait-on pas?

L’honorable Donald Neil Plett : Tout d’abord, j’aimerais dire à tous ceux qui voudraient donner suite à la proposition du sénateur Munson que je serai juste à l’extérieur. Cela me fait toujours plaisir de recevoir des accolades. J’en donnerai même au sénateur Munson et à mon cousin, le sénateur Harder.

Il est parfois honteux que nous ayons à nommer un porte-parole pour critiquer un projet de loi, mais c’est comme cela. Je vais poser un geste généreux et dire que je ne souhaite pas prendre la parole à ce sujet, ni la semaine prochaine ni la semaine d’après, et que je demande donc l’ajournement du débat.

(Sur la motion du sénateur Plett, le débat est ajourné.)

L’étude sur les effets de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone

Dixième rapport du Comité de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’étude du dixième rapport (intérimaire) du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles, intitulé La décarbonisation des transports au Canada, déposé au Sénat le 22 juin 2017.

L’honorable Richard Neufeld : Honorables sénateurs, je fais appel à votre indulgence. Je propose que le débat soit ajourné à la prochaine séance du Sénat pour le temps de parole qu’il me reste.

(Sur la motion du sénateur Neufeld, le débat est ajourné.)

[Français]

L’étude sur les incidences financières et les considérations régionales du vieillissement démographique

Adoption du dix-neuvième rapport du Comité des finances nationales et de la demande de réponse du gouvernement

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Mockler, appuyée par l’honorable sénatrice Martin,

Que le dix-neuvième rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales intitulé Soyons prêts : Pour une nouvelle génération d’aînés actifs, déposé auprès du greffier du Sénat le 27 juin 2017, soit adopté et que, conformément à l’article 12-24(1) du Règlement, le Sénat demande une réponse complète et détaillée du gouvernement, le ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social étant désigné ministre chargé de répondre à ce rapport, en consultation avec la ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’oeuvre et du Travail et avec la ministre de la Santé.

L’honorable Diane Bellemare (coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat) : Chers collègues, je prends la parole aujourd’hui pour vous dire que je suis prête à adopter le dix-neuvième rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Je précise que je parle en mon nom, et non à titre de coordonnatrice législative. J’ai demandé que le débat soit ajourné à mon nom, parce que je connais assez bien le sujet de cette étude. En outre, je voulais prendre le temps de lire attentivement le rapport avant de l’appuyer.

[Traduction]

J’aimerais d’abord remercier le comité de son rapport concis, mais néanmoins plein de renseignements importants. À mon avis, le comité a réussi à déceler plusieurs problèmes financiers liés au vieillissement de la population et formule des recommandations utiles qui méritent d’être prises en considération par le gouvernement.

Le comité a l’intention de poursuivre son étude des incidences financières et des considérations régionales du vieillissement démographique.

[Français]

Vous n’êtes pas sans savoir que le vieillissement de la population est lié à deux phénomènes démographiques distincts.

Le premier, c’est le baby-boom qu’ont connu le Canada et certaines provinces au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Le groupe des baby-boomers, auquel plusieurs d’entre nous appartiennent, a donné du souci aux gouvernements canadiens lorsqu’il a intégré le marché du travail à la fin des années 1960. Aujourd’hui, ces personnes tirent leur révérence et se retirent tranquillement du marché du travail, mais en masse, ce qui crée ainsi des pénuries de main-d’œuvre dans plusieurs secteurs d’activité.

Le deuxième enjeu est associé au vieillissement de la main-d’œuvre en général. En effet, comme l’espérance de vie augmente et que les familles sont généralement moins nombreuses que dans les années 1950, le vieillissement de la main-d’œuvre est inéluctable. Il touchera l’ensemble des provinces et des pays développés. À l’heure actuelle, comme le souligne le rapport du Comité des finances, et je cite :

[…] l’âge médian au Canada ne cessera d’augmenter : de 24,1 ans en 1923 et de 40,2 en 2013, il devrait se situer entre 41,7 et 46,5 ans en 2063.

Soulignons également que les calculs de l’Institut de la statistique du Québec, effectués à partir des données de Statistique Canada, indiquent que le taux d’accroissement naturel moyen de la population en âge de travailler — c’est-à-dire la population âgée de 15 à 65 ans — est négatif pour les populations de l’Atlantique depuis 2012. Dit simplement, la population qui a l’âge de travailler dans les provinces de l’Atlantique diminue en valeur absolue. Ce n’est pas le cas dans les autres provinces, mais il y a tout de même une tendance à ce que cela se produise assez tôt au Québec.

Ces deux phénomènes conjugués ont un impact sur les dépenses des gouvernements, notamment en matière de soins de santé et de prestations de pension de retraite. Ils peuvent aussi avoir un impact sur les revenus des gouvernements. Si le vieillissement de la population se traduit par une diminution de la population en âge de travailler et de la population active et que la productivité n’augmente pas en conséquence, le revenu national risque de diminuer, ainsi que les sources de revenus pour les gouvernements, à moins que des robots se substituent à la main-d’œuvre.

(1530)

Il faut donc se préoccuper de ce phénomène. Comme le souligne le rapport du comité, et je cite :

Ce n’est pas la première fois que le Sénat étudie le vieillissement démographique. L’honorable Sharon Carstairs, qui a présidé le Comité spécial sur le vieillissement de 2006 à 2009, affirme toutefois que « peu de choses ont changé » et que « nous sommes terriblement mal préparés pour nous occuper de notre société vieillissante ».

[Traduction]

Honorables collègues, je voudrais porter à votre attention les recommandations contenues dans le rapport. Même si le sénateur Mockler a expliqué en détail les recommandations du comité, je souhaite vous les présenter de nouveau :

RECOMMANDATION 1 : Que le gouvernement du Canada élabore, en collaboration avec ses partenaires provinciaux, territoriaux et autochtones, une stratégie nationale pour les aînés afin de contrôler la croissance des dépenses, tout en s’assurant d’offrir des soins appropriés et accessibles.

RECOMMANDATION 2 : Que le gouvernement du Canada continue de travailler avec ses partenaires provinciaux, territoriaux et autochtones à mettre en place des mesures permettant aux personnes âgées de demeurer à domicile tout en ayant accès à des services de soutien, notamment ceux offerts par des aidants naturels.

RECOMMANDATION 3 : Que le gouvernement du Canada, en collaboration avec ses partenaires provinciaux, territoriaux et autochtones, mette en œuvre des mesures pour accroître la participation des groupes sous-représentés au sein de la population active et pour améliorer l’adéquation entre la demande et l’offre de main-d’œuvre afin d’atténuer les conséquences néfastes du vieillissement démographique sur l’économie et sur le marché du travail.

RECOMMANDATION 4 : Que le gouvernement du Canada envisage la possibilité d’inclure des considérations démographiques dans le calcul des principaux transferts fédéraux aux provinces et territoires afin de s’assurer que toutes les régions du pays disposent des ressources nécessaires pour s’acquitter des responsabilités qu’ils ont à l’égard de leur population vieillissante.

Chers collègues, avez-vous remarqué que trois de ces recommandations ont quelque chose en commun? Trois des quatre recommandations demandent la participation et la collaboration des « partenaires provinciaux, territoriaux et autochtones ». Ce n’est pas anodin. C’est peut-être ce qui explique pourquoi Sharon Carstairs a dit au comité que rien n’avait changé depuis le dépôt d’un autre rapport sénatorial il y a quelques années.

[Français]

Trois des quatre recommandations nécessitent la participation et la collaboration des partenaires provinciaux, territoriaux et autochtones. Ce n’est pas anodin.

Le partage constitutionnel des pouvoirs et des responsabilités est une réalité canadienne à laquelle nous sommes confrontés lorsque vient le temps de partager des solutions à des problématiques communes et de nature pancanadienne. Qu’il s’agisse de programmes de main-d’œuvre, de régime de retraite ou de l’âge de la retraite, sans parler des questions liées à la santé, la résolution de problèmes est un exercice politique complexe au Canada.

En d’autres mots, la question des relations fédérales-provinciales est un défi constant au Canada qu’il ne faut ni ignorer ni sous-estimer. Cette question fait partie de la solution dans le cadre de nombreux défis auxquels font face les Canadiens et les Canadiennes.

[Traduction]

Au Canada, les relations fédérales-provinciales constituent un enjeu permanent dont on ne peut ni ignorer ni sous-estimer l’importance. Elles font partie intégrante de la solution à de nombreux défis auxquels les Canadiens sont confrontés.

[Français]

Je suis persuadée que je ne vous apprends rien. Je suis persuadée aussi que le Sénat, en raison de sa composition et de son mandat constitutionnel, peut apporter une contribution dans ce dossier. Une analyse des façons de faire des autres fédérations pourrait être très utile pour le Canada. L’Australie, par exemple, semble réussir à prendre des mesures qui mettent à contribution l’ensemble des gouvernements, tant au chapitre de la formation de la main-d’œuvre que des infrastructures. Même l’Union européenne réussit à se concerter sur des enjeux comme celui de la main-d’œuvre et bien d’autres qui réunissent différents pays avec des univers très distincts.

Je nous invite donc à réfléchir à cet enjeu des relations fédérales-provinciales, qui pourrait faire l’objet d’une étude par un comité ou d’une étude spéciale, mais, entre-temps, je propose que l’on adopte le rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Merci.

Des voix : Bravo!

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Traduction]

L’obligation légale du gouvernement de protéger et de maintenir le système de dons de sang volontaires

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénatrice Wallin, attirant l’attention du Sénat sur l’obligation légale du gouvernement fédéral de protéger et de maintenir le système de dons de sang volontaires du Canada et d’examiner les questions liées à la rémunération des donneurs de sang dans le cadre d’activités commerciales.

L’honorable Lucie Moncion : Je propose que le débat soit ajourné à la prochaine séance pour le reste du temps de parole dont dispose la sénatrice Omidvar.

(Sur la motion de la sénatrice Moncion, au nom de la sénatrice Omidvar, le débat est ajourné.)

L’honorable Joan Fraser

Interpellation—Suite du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l’interpellation de l’honorable sénateur Day, attirant l’attention du Sénat sur la carrière de l’honorable sénatrice Fraser.

L’honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui dans le cadre de l’interpellation du sénateur Day sur la carrière exceptionnelle de la sénatrice Joan Fraser, qui a récemment pris sa retraite. Joan Fraser est une personne unique et remarquable. Elle a servi le Sénat avec loyauté. Dans ses écrits, le mahatma Gandhi a parlé de la nature et du caractère du service ainsi que de ceux qui servent. Dans l’ouvrage intitulé The Mind of Mahatma Gandhi, à la page 229, Gandhi a dit ceci :

Celui qui se dévoue tranquillement au service des autres comprendra au fil des jours combien il est nécessaire de le faire sans compter. Sa foi ira sans cesse grandissant. Celui qui est incapable de renoncer à son intérêt personnel et de reconnaître les conditions de sa naissance peut difficilement se mettre au service des autres. Consciemment ou non, chacun de nous rend service d’une façon ou d’une autre. Si nous cultivons l’habitude de rendre service intentionnellement, notre désir de le faire s’accroîtra sans cesse et contribuera non seulement à notre bonheur, mais aussi au bonheur du monde en général.

Notre distinguée collègue, l’honorable Joan Fraser, de Montréal, au Québec, a connu du succès dans sa carrière journalistique. Elle a notamment occupé le poste de rédactrice en chef du Montreal Gazette. Elle a connu encore plus de succès dans sa carrière de sénatrice, qui a duré 20 ans. Elle a contribué énormément au bien public du Canada et des Canadiens. De plus, elle a loyalement rempli ses fonctions au sein de l’Union interparlementaire, l’UIP, où elle a été membre du comité de direction.

(1540)

Honorables sénateurs, c’est peut-être en grandissant à l’étranger que la sénatrice Fraser s’est mise à aimer son pays natal. Dans une entrevue en date du 26 mars 2012 qu’on peut consulter sur le site web de l’UIP, la sénatrice Fraser a déclaré ce qui suit :

J’avais déjà eu la chance de vivre en dehors du Canada. En fait, mon père travaillant pour une société multinationale, j’ai grandi à l’étranger. J’ai vécu en Amérique du Sud, avec mes parents, de l’âge de 2 ans à 20 ans environ. J’avais donc, de ce point de vue, déjà une bonne idée du monde en développement et du Canada. C’est probablement ce qui m’a aidée à l’UIP, mais j’y ai aussi beaucoup appris — entre autres choses, combien nous avons de la chance, au Canada.

Chers collègues, les expériences que la sénatrice Fraser a vécues à l’étranger, le diplôme qu’elle a obtenu de l’Université McGill et les postes qu’elle a occupés dans les domaines de la presse écrite et de la radiodiffusion l’ont préparée à connaître une carrière extraordinaire et inspirante au Sénat. Elle adorait son travail au Sénat et elle a déjà dit que l’un des aspects les plus intéressants de ses fonctions « […] était d’avoir une incidence sur la vie de vraies personnes ».

De par sa grande maîtrise de la langue anglaise et sa façon de s’exprimer et de se comporter, la sénatrice Fraser a été une figure dominante au Sénat, tout comme elle l’est aussi dans la vie de tous les jours. Ses qualités exceptionnelles l’ont très bien servie lorsqu’elle a occupé des postes de direction au Sénat. On se souviendra qu’elle a été choisie deux fois pour assumer les fonctions de leader adjointe de l’opposition au Sénat, soit d’avril 2006 à janvier 2007, puis d’août 2013 à juin 2016.

Chers collègues, l’énergie, les multiples talents, la passion, la sagesse et l’éloquence de la sénatrice Fraser sont grandement appréciés par les nombreux sénateurs qui la connaissent bien, comme moi.

J’espère que la sénatrice Fraser et son cher époux, Michel Faure, profiteront de leur retraite bien méritée. Je suis convaincue que la sénatrice Fraser connaîtra autant de succès dans sa retraite qu’elle en a connu dans son travail au Sénat et dans sa carrière. Telle est ma prière et tel est mon souhait pour elle et son époux. En terminant, je cite le célèbre poème de John Donne intitulé Pour qui sonne le glas :

Nul homme n’est une île, un tout en soi; chaque homme est partie du continent, partie du large; si une parcelle de terre est emportée par les flots, pour l’Europe c’est une perte égale à celle d’un promontoire, autant qu’à celle d’un manoir de tes amis ou du tien. La mort de tout homme me diminue parce que je suis membre du genre humain. Aussi n’envoie jamais demander pour qui sonne le glas : il sonne pour toi.

Chers collègues, la sénatrice Fraser est l’une des grandes femmes du Canada. Elle a toujours été d’une profonde humanité. Elle comprend bien que tous les membres du genre humain forment un tout.

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Sénatrice Cools, je vous remercie d’avoir pris la parole sur cette interpellation, au sujet de laquelle je souhaitais à l’origine intervenir. Elle était inscrite au Feuilleton depuis un certain temps. Je propose l’ajournement du débat pour le reste de mon temps de parole, puisque j’ai eu la chance de travailler en étroite collaboration avec la sénatrice Fraser lorsqu’elle était leader adjointe de l’opposition.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Le Sénat

Motion concernant l’infrastructure de Terre-Neuve-et-Labrador—Débat

L’honorable Norman E. Doyle, conformément au préavis donné le 1er mars 2018, propose :

Que le Sénat encourage le gouvernement du Canada à travailler avec le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador, la seule province dont les centres de population majeurs ne sont pas physiquement liés à la partie continentale du Canada, pour évaluer la possibilité de construire un tunnel pour relier l’île de Terre-Neuve au Labrador et à la Côte-Nord du Québec, dans le but de favoriser un plus grand développement économique dans le nord-est du Canada et de renforcer davantage l’unité nationale, y compris la possibilité de recourir aux fonds du programme d’infrastructure pour ce travail;

Qu’un message soit transmis à la Chambre des communes pour l’informer de ce qui précède.

— Honorables sénateurs, il y a environ 10 ans, j’ai présenté une motion d’initiative parlementaire à la Chambre des communes semblable à celle-ci. Cette motion visait à améliorer le réseau de transport de Terre-Neuve-et-Labrador, notamment par la construction d’un tunnel, et elle avait reçu l’appui unanime de tous les partis représentés à la Chambre des communes. À présent, je pense qu’il est tout à fait indiqué de présenter une motion ici, au Sénat, et de demander, encore une fois, au gouvernement du Canada d’étudier l’idée d’un tunnel qui relie l’île de Terre-Neuve et le Canada continental, dans la région du détroit du Labrador.

Je suis d’avis qu’un tunnel est plus nécessaire que jamais pour les raisons que je vais expliquer, si un tel projet est viable sur le plan économique ou politique. Au fond, j’ignore s’il l’est, mais selon moi il est temps qu’on trouve la réponse. Nous devrions faire une évaluation.

Je ne suis pas le seul qui pense de cette façon et, par conséquent, je dois remercier le premier ministre Ball, car, il y a quelques jours, le gouvernement de Terre-Neuve a mis à jour une étude réalisée en 2004 sur la construction d’un lien fixe qui relierait le Labrador et l’île de Terre-Neuve. Dans cette nouvelle étude de préfaisabilité, il est question d’un tunnel ferroviaire d’une longueur de 18 kilomètres qui va coûter 1,6 milliard de dollars et dont la construction prendra 15 ans.

Un tunnel de ce genre pourrait faire passer jusqu’à 400 véhicules par heure entre l’île et le Labrador, ce qui éliminerait le service de traversier du détroit de Belle-Isle et réduirait de 60 p. 100 le trafic empruntant le traversier de Marine Atlantique dans le golfe. Le premier ministre de la province dit que la prochaine étape consiste à faire une étude de faisabilité de 23 millions de dollars, et j’encouragerais le gouvernement fédéral à participer de manière générale au financement de cette étude. Je crois que la province est sérieuse dans sa démarche et qu’elle mérite qu’on l’appuie à l’échelon national.

J’ai appris que, pas plus tard que la fin de semaine dernière, lors de son congrès annuel, le Parti libéral fédéral avait adopté une résolution pour appuyer ce genre d’idée. La motion dont nous sommes en train de débattre aujourd’hui est donc tout à fait appropriée, et je suis extrêmement heureux de savoir que nous sommes nombreux maintenant à voir la lumière au bout du tunnel.

L’île de Terre-Neuve est la seizième en superficie dans le monde. Là où le détroit est le moins large, elle n’est qu’à 15 kilomètres de la partie continentale du Canada et de l’Amérique du Nord. Dans n’importe quel autre pays moderne, j’imagine mal qu’on n’aurait pas déjà construit un tunnel, en particulier lorsqu’on sait que des tunnels beaucoup plus longs existent aujourd’hui. Un tunnel de 54 kilomètres de long a été construit au Japon. Ce n’est pas une idée nouvelle. C’est assez courant aujourd’hui en Chine, en Norvège et à beaucoup d’autres endroits.

Les principales raisons pour lesquelles je souscris à l’idée d’un tunnel sont résumées dans la motion. Il s’agit de faciliter le développement économique du nord-est du Canada et de renforcer l’unité nationale. Pour bien montrer l’utilité du tunnel, je souligne que la traversée de 150 kilomètres entre la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve, dans le golfe du Saint-Laurent, n’est pas qu’une petite excursion et n’est pas de nature à inciter les gens à visiter l’île. Ce n’est pas non plus bon marché pour un touriste. Permettez-moi de vous donner un exemple à cet égard. Il vous en coûtera 604,68 $ pour transporter aller-retour, à bord du traversier, une fourgonnette de 28 pieds avec deux adultes et deux enfants. Si vous choisissez de louer une cabine pour pouvoir y dormir, il vous en coûtera 252 $ de plus pour l’aller et le retour. Ajoutons quelques repas et deux ou trois pleins d’essence, et vous aurez facilement dépensé 1 000 $ avant même de commencer vos vacances. Voilà donc le problème à résoudre : comment pourrait-on faire croître le nombre de visiteurs? Après tout, nous vivons sur une île, et notre lien routier avec le reste du Canada est une traversée en bateau qui est longue de 150 kilomètres, en comptant l’aller seulement, et qui ne peut se faire que lorsque la météo le permet, bien entendu.

Je m’en voudrais de ne pas mentionner que l’approvisionnement de Terre-Neuve en aliments frais dépend du service de traversier, qui est souvent interrompu pendant des jours à cause du mauvais temps et de la glace. Pour les touristes les plus courageux, qui s’aventurent sur le traversier pendant cette période de l’année, le risque de se faire tamponner par un camion chargé de laitue fraîche n’est certainement pas une perspective réjouissante. Pour bien saisir l’enjeu, on n’a qu’à regarder ce qui a été fait à l’Île-du-Prince-Édouard. La construction du pont de la Confédération a transformé l’économie de l’Île-du-Prince-Édouard, et je suis persuadé qu’un tunnel aurait le même effet sur Terre-Neuve.

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Les retombées d’un tunnel rejailliraient bien au-delà de Terre-Neuve-et-Labrador. Les dirigeants municipaux de la Côte-Nord québécoise, du détroit du Labrador et de la péninsule Northern de Terre-Neuve font pression sur les gouvernements fédéral et provinciaux depuis des années en faveur de ce projet.

Le gouvernement du Québec n’a pas encore terminé la route 138, qui reliera Québec à la Côte-Nord et à l’ensemble du Labrador. En fait, les Québécois qui habitent à Fermont pourront un jour se rendre en voiture jusqu’à Québec en passant par la route translabradorienne et la route 138.

Une fois achevée, la route 138 facilitera le développement économique de toute la péninsule labradorienne, et plus particulièrement de ses secteurs forestier et minier. La construction d’un tunnel sous le détroit de Belle-Isle permettrait au tourisme de s’étendre dans l’ensemble de la région. Pour la toute première fois, les touristes de partout en Amérique du Nord pourraient se rendre jusqu’à l’île de Terre-Neuve en auto après avoir traversé le Labrador. Pareil lien routier représenterait un apport économique sans pareil pour les habitants et les localités du nord-est du Canada.

Je disais tout à l’heure qu’un tunnel favoriserait l’unité nationale. Je m’explique.

Tout le monde connaît la rivalité entre le Québec et Terre-Neuve-et-Labrador quant au développement hydroélectrique de la péninsule labradorienne, mais ces deux provinces ont aussi une chose en commun : sur le plan culturel, elles sont uniques.

Parce qu’on y parle français, le Québec est considéré depuis longtemps comme la première « société distincte » du Canada, et c’est tout à fait vrai. Cela dit, étant donné son histoire incomparable et l’anglais tout particulier qu’on y parle, je suis personnellement d’avis que, au palmarès des sociétés distinctes canadiennes, Terre-Neuve arrive bonne deuxième.

Les gouvernements des deux provinces ont récemment signé une entente de collaboration. Ils ont convenu de collaborer sur certains dossiers lorsque c’est bénéfique pour chacun d’eux. Lier ces deux provinces distinctes au moyen d’un tunnel mènera à un meilleur dialogue, à une meilleure compréhension et à un plus grand respect de part et d’autre. La construction d’un tunnel transformerait les deux provinces et servirait à renforcer l’unité nationale.

De toute évidence, il y aura des difficultés à surmonter. Par exemple, certaines collectivités des provinces de l’Atlantique aimeraient conserver leur autorité pour ce qui est de servir l’île de Terre-Neuve au moyen du transport maritime. Elles font sans doute pression sur leurs députés à cet égard. Cependant, dans la mesure où un projet de tunnel est viable, les intérêts de quelques personnes justifient-ils d’empêcher le progrès pour le reste de la population?

Voilà ce terme de nouveau : viable. Depuis de nombreuses années, les habitants de Terre-Neuve-et-Labrador s’interrogent à savoir si un tunnel est viable sur le plan politique ou économique. Il n’y a pas de doute qu’il est techniquement réalisable, et je crois sincèrement que cette idée vaut le coût d’une étude de faisabilité en bonne et due forme. Il serait utile d’obtenir quelques réponses et quelques renseignements exacts. Nous serions ainsi en mesure de déterminer si l’idée du tunnel, dont on parle si souvent, est valable ou pas.

Alors que nous débattons de cette question, une grande partie des régions rurales de Terre-Neuve est en déclin. Un tunnel représente l’un de nos meilleurs espoirs. Nous ne pouvons pas revenir en arrière, mais nous n’avons pas à disparaître sans dire un mot. Si un tunnel pouvait ralentir un tant soit peu le déclin, une grande partie de Terre-Neuve-et-Labrador pourrait envisager de meilleurs jours, tout particulièrement dans les régions rurales.

Par l'intermédiaire de cette motion, je demande au gouvernement fédéral d’aider Terre-Neuve-et-Labrador à financer une étude. La province a déjà entamé le processus. Comme il s’agit d’un projet visionnaire qui s’échelonnera sur plusieurs années, j’encourage le gouvernement fédéral à adopter une vision aussi étroite qu’un tunnel dans ce dossier.

L’honorable Terry M. Mercer (leader adjoint des libéraux au Sénat) : Accepteriez-vous de répondre à une question, sénateur Doyle?

Le sénateur Doyle : Oui.

Le sénateur Mercer : C’est une proposition très intéressante, sénateur Doyle, qui mérite qu’on y donne suite. Vous avez parlé d’un tunnel réservé à la circulation automobile. D’autres souhaiteraient un lien ferroviaire, ce qui causerait une confusion certaine, puisqu’il faudrait créer un tout nouveau réseau ferroviaire à Terre-Neuve. Celui-ci a été démantelé il y a de nombreuses années, quand le Newfie Bullet a cessé de rouler.

D’après les remarques de votre collègue, sénateur Manning, tout ce qu’il faut, c’est solliciter la population de Terre-Neuve par n’importe quel moyen. Tout ce qu’il faut, c’est emprunter une voiture à un Terre-Neuvien et tout ira bien. Votre estimation de coûts ne servira plus à rien puisque, comme l’a dit le sénateur Manning, en arrivant, vous n’avez pas besoin de voiture, il vous suffit d’en emprunter une à un Terre-Neuvien. De plus, si vous savez vous y prendre, vous vous ferez offrir le logement et la nourriture. Ce sont autant de coûts en moins dont il faut tenir compte.

Plus sérieusement, cela vaut la peine d’y penser. Il s’agit de résoudre un problème d’unité, découlant d’un vieux contentieux opposant Terre-Neuve et Québec à propos du développement hydro-électrique au Labrador.

Pensez-vous que ce lien réglerait le problème, ou bien en créerait-il d’autres par rapport à la concurrence entre Terre-Neuve et le Québec?

Le sénateur Doyle : Merci de votre question, sénateur Mercer. Je pense que ce serait une bonne chose à la fois pour le Québec et pour Terre-Neuve-et-Labrador. En conséquence, je crois avoir l’appui de mes collègues du Québec à propos de cette motion.

Les habitants de la Côte-Nord du Québec font aussi des pressions en vue de la construction de ce tunnel depuis un bon moment. Il reste environ 250 kilomètres à améliorer, à aménager et à asphalter pour achever la route 138 sur la Côte-Nord du Québec. Si le tunnel était approuvé, il faudrait environ 15 ans pour le construire. Je parie que bien des projets du Québec et de Terre-Neuve pourraient se faire conjointement et seraient facilités par ce lien entre la péninsule Northern de Terre-Neuve et les détroits du Labrador.

Donc, oui, je crois qu’il pourrait y avoir beaucoup de bons projets hydroélectriques et forestiers entrepris de manière coopérative entre le Québec et Terre-Neuve si nous avions ce genre de lien à cet endroit.

Le sénateur Mercer : Dans votre présentation initiale, j’ai entendu que certaines collectivités s’opposeraient peut-être au tunnel en raison de leur propre dépendance économique au transport à destination et en provenance de Terre-Neuve-et-Labrador. Bien entendu, la première de ces collectivités serait North Sydney, en Nouvelle-Écosse, qui est le point d’arrivée et de départ du traversier.

Il me semble que, si l’on aménageait le tunnel, il faudrait que le gouvernement du Canada s’engage, notamment à l’endroit de North Sydney, mais aussi envers tout le Cap-Breton, à remédier, au cours des 15 ans qu’il faudrait pour aménager le tunnel, aux incidences économiques pour le port de Sydney et le chemin de fer qui relie Sydney à la partie continentale de la Nouvelle-Écosse, à Truro, puis au reste du Canada en passant par l’intérieur des terres.

Croyez-vous qu’il faille mentionner cela dans le cadre de votre démarche? Croyez-vous que, en plus de parler de l’aménagement d’un tunnel entre le Labrador et Terre-Neuve, nous devrions compenser, ou du moins réduire, les incidences économiques de la fermeture du traversier à North Sydney?

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, il est 16 heures. Deux choses coïncident : le temps de parole du sénateur Doyle est écoulé, ce qui signifie que, lorsque nous reprendrons ce débat à la prochaine séance, il pourra demander cinq minutes supplémentaires pour répondre aux questions, car je sais qu’il y a au moins un autre sénateur qui souhaite poser des questions.

(À 16 heures, conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 4 février 2016, le Sénat s’ajourne jusqu’à 13 h 30 demain.)

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